Simplification, le mot est jeté. Normal, puisqu’il semble être dans l’air. Bien sûr qu’un vin peut être simple. Même un vin de Carignan a le droit de ne pas péter aussi haut que le sommet de son cep rabougri ! Yes sir, je l’affirme, un vin a le droit d’être modeste, petit, sympa, pas compliqué, facile, gentillet, mignon… À une condition : il doit être tout à fait correct. Question de jugement, me rétorquerez vous. Certes. Reste qu’un vin devrait pouvoir, dans certains cas, être sans vice ni vertu et être bon à la fois. On ne saurait boire de grands vins tous les jours, alors pourquoi se creuser davantage le ciboulot ? C’est avec ce mélange de pensées teintées de questionnements dubitatifs sur la simplification adaptée au vin que j’abordais l’échantillon de Carignan adressé par les associés de ce petit domaine créé il y a 10 ans à Saint-Paul-de-Fenouillet par un groupe composé d’une dizaine d’amis œnophiles de tous horizons.
Oui, le dégustateur, même le plus modeste et le plus humble (ça c’est moi tout craché !) se pose parfois des questions existentielles… J’avais donc devant moi ce Côtes Catalanes 2009 qui venait à point nommé dans ma réflexion sur l’art – si tant est que cela puisse être un art – de la simplification. Et je me disais, en le goûtant, que ce rouge Domaine de Vénus à peine fruité au nez et tout juste corsé en bouche entrait probablement dans ce registre. Sauf qu’il n’avait rien de sensationnel, qu’il manquait même de corps et de vie, qu’il ne résonnait pas dans mon palais, qu’il ne procurait pas la moindre petite étincelle. Je me suis dit : « Là, mon coco, tu vas un peu fort ». Alors je l’ai laissé se ressaisir. Pour mieux le reprendre en bouche le lendemain sans ressentir grand chose de bien nouveau par rapport à la première expérience. Puis rebelote le surlendemain pour constater que ce Carignan de vieilles vignes dont le nom ne s’affiche pas sur la bouteille, n’est décidément pas d’humeur à se livrer. Petit nez épicé, bouche plate exempte de soubresauts, fruité présent mais sans excès, sans éclat, un vin étale, sans poudrage ni maquillage, soit, mais un vin à peine agréable, à peine à la hauteur de son prix : 7,50 € départ cave. Le blanc « L’Effrontée », Côtes du Roussillon 2009 associant carignan blanc et grenache gris, est certes plus intéressant mais deux fois plus cher. Alors, que faut-il en penser ?
Sans vouloir jouer les donneurs de leçon, quand on constate le nombre de grands vins de carignan alentours et la quantité de vieilles vignes disponibles dans les Fenouillèdes – à condition de bien les conduire et de bien les vendanger -, lorsqu’on lit affiché bien en vue sur le site le credo des associés impliqués dans ce domaine (voir ici), cela m’étonne au plus haut point de voir combien ce Carignan, qui devrait être le fleuron de Vénus et tout au moins un des modèles de la Haute Vallée de l’Agly, se conduit sans âme, sans fraîcheur, sans fierté, sans brio. C’est un rouge simple, voilà tout.
Voilà qui est dit sans ménagement. Mais au moins, selon le vieil adage qui veut que « qui aime bien châtie bien », c’est dit avec cœur. Le problème est que c’est la deuxième fois que je goûte ces vins en quelques années et qu’à chaque fois j’en tire les mêmes conclusions. C’est dire que les vins ne progressent pas et je crois savoir pourquoi. À moins que ce soit moi qui ne régresse.
Michel Smith
Post scriptum. N’ayant pas la science infuse, je crois pouvoir affirmer cependant que pour faire du bon vin il faut une personne derrière, une présence. Une personne qui se donne corps et âme, qui vit son vin. Le vin ne peut se faire par des gens qui se trouvent à mille kilomètres de leurs vignes et qui n’ont qu’une vision imagée de leur production.
Voila Vénus rhabillée pour l’hiver, l’Ami!
Mais c’est ton droit de ne pas aimer, et même, de le dire.
Sinon, à quoi ça sert que le Carignophile se décarcasse…
Hervé
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Euh, je suis aussi un peu Carignophage… 😉
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Ou peut-être « carignovore »?
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Selon la dernière phrase (post scriptum) je pense que je dois me démenager plus proche du Roussillon! 😉
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You’re welcome Russ !!!
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