Il se vide de son sang dans une vigne de Champagne

Encore un fait divers à glacer le sang. Encore une victime du progrès. Ou bien faut-il y voir une conséquence de la crise, et de son corollaire, la course effrénée à la rentabilité qui pousse certains domaines viticoles à engager des gens de moins en moins qualifiés, qu’ils ne prennent plus la peine de former?

secateur-electrique

Photo Lisson

Le sécateur fonctionnait toujours

Lundi dernier, un ouvrier agricole d’Avize (Marne), qui effectuait la taille d’une vigne, s’est littéralement vidé de son sang après s’être presque entièrement découpé l’abdomen avec son sécateur électrique.

Détail sordide: tenu fermement par la main du mort, le sécateur fonctionnait toujours à l’arrivée des secours.

Détail encore plus sordide: on ne taille pas la vigne en mai, après le débourrement!

Number One

Vous n’êtes pas sans savoir que ce site a été désigné comme « le plus influent des blogs de vin », pour ce mois de mai, par le classement eBuzzing (ex-Wikio).

Bien que je n’ai jamais bien compris comment fonctionne ce classement, je ne vais pas bouder mon plaisir. J’adore cette « coopérative de l’écriture ». Pas forcément chaque article, pris isolément – surtout pas dans ce que j’écris moi-même. Mais l’ensemble, la diversité, le flux constant des idées, le kaléidoscope de nos 5 plumes. Le côté « famille », aussi.

Ce que disent les chiffres

Cependant, je ne peux m’empêcher de remarquer (au vu des chiffres de notre hébergeur WordPress), que les articles qui attirent le plus grand nombre de gens sont les articles polémiques; ceux aux titres les plus accrocheurs; les billets où le lecteur se dit qu’il va y avoir du sport, à défaut de sang.

La preuve: si vous lisez ceci, c’est peut-être parce que mon titre grand-guignolesque vous a attiré ici. Au fait, mes plus plates excuses à toutes les victimes de sécateurs fous ainsi qu’à leurs aimables fabricants…

Les blogs comme celui-ci sont libres de toute publicité, ils ne coûtent rien au lecteur, et ce dernier a un choix presque illimité; en tout cas, il lui faudrait des siècles pour tout lire. Il doit donc faire des choix, des arbitrages entre les blogs.

Comme auteur, comme journaliste, j’aimerais beaucoup que le lecteur s’intéresse à des commentaires de jolis vins, qu’il parte à la découverte de cépages oubliés ou de vignerons méritants. Je constate malheureusement qu’il se passionne plus – en moyenne – pour l’actualité judiciaire de Saint Emilion, pour la cotation des primeurs, pour le scandale des pesticides, pour la cryo-congélo-contraction, pour la critique du terroir ou pour les fantaisies des AOC que pour la réussite de vignerons modèles.

Il y a des exceptions, bien sûr, comme avec l’article de Michel sur Pibarnon – mais s’il faut qu’un vigneron meure pour qu’on s’intéresse à lui, c’est cher payé, non?

Sex, drugs & rock & roll

Ce blog est donc le reflet un peu déformé de notre propension pour le sensationnel, de notre goût très gaulois pour la castagne, quand ce n’est pas notre goût morbide pour les trains qui déraillent, pour les avions qui  tombent. Restent le sexe, la drogue et le rock and roll. Le trash.

J’ai failli titrer « La culotte de Madonna dans un fût d’Angelus » (une réminiscence de mon passage dans une institution religieuse, sans doute). Mais notre hébergeur nous interdit de publier du contenu à caractère pornographique – je parle du prix de l’Angelus, bien sûr.

Madonna

Le summum du mauvais goût (je parle du montage, bien sûr – mes excuses à M. de Boüard)

Sacrées levures!

On ne peut pas grand chose au sensationnalisme ambiant. Ce n’est pas moi qui décide que cent fois plus de Français se passionnent pour le cook-bashing de Top Chef, ou les pitoyables donneurs de leçons de The Voice ou de la Star Academy, plutôt que pour les documentaires de vulgarisation scientifique de National Geographic.

Je continuerai donc à poster des billets torrides sur les moeurs des levures en milieu réducteur; ou bien, je vous emmènerai en voyage dans le vignoble, que ce soit à Baixas, à Fleurie, à Stellenbosch ou au Cap Bon; tant pis si je n’explose pas le compteur!

Bon, d’accord, de temps à autre, je pousserai un bon coup de gueule sur les pesticides, le goût de bouchon, les gourous du vin, le protectionnisme franchouillard ou l’ineptie des classements (on ne se refait pas).

Juste parce que ce jour là, ce sera mon bon plaisir.

A quoi servirait un blog, sinon? A faire de l’audience?

Laissons ça aux mercenaires de la presse…

Hervé Lalau

18 réflexions sur “Il se vide de son sang dans une vigne de Champagne

  1. Jean -Pierre Glorieux

    Rien trouvé sur le site du journal local , l’Union de Reims
    c est donc un sordide canular !
    mais j ai été effaré par le prix de ce sécateur : il équivaut à plus de 100 bouteilles prix d appel en r ayons de la G.D. ( Grande Distribution )

    j y ai aussi appris qu une manifestation locale remet un sécateur d or aux champions de la taille : cette pratique , la taille mal connue mais essentielle dans le cycle de la vigne mériterait une enquête sérieuse: quoi de commun entre la vigne en bordelais et l Alsace ou le Val de Loire ?

    J’aime

    1. M. Glorieux, c’est pire qu’un canular, c’est de la désinformation délibérée dans le but de susciter un rejet du sensationnalisme. A vous de dire si c’est réussi, utile, ou futile.

      J’aime

      1. J’ ai ostensiblement joué les naïfs mais pas dupe quand même ! Abonné au blog du quotidien champenois tenu par une dame fort compétente rien de m échappe sur l actu de la région, bien que je vive au cœur de la Normandie où d ailleurs il existe un beau vignoble en production : http://www.arpents-du-soleil.com/

        Et en vieux situationniste j ai quelques outils dans ma besace !

        Merci Hervé

        J’aime

  2. Padronnasanctus

    @Hervé: « If your slate is clean, then you can throw stones …” et on connaît la suite. Moi, j’ai des vignes sur … schiste. Et « En mai, fais ce qu’il te plaît ». Tu as raison de dire que, en principe, on ne taille pas après le débourrement. C’est contre-productif. Toutefois, « Nécessité fait loi » et plus d’un y est obligé. L’an dernier, j’ai été forcé de tailler la dernière parcelle (70 ares) le 4 mai. Les sarments avaient 40 cm sur ce coteau ! Et la récolte n’a pas été pire qu’ailleurs (en quantité). Mais bon, c’était une année tellement radine en raisins que « Moins que cela, tu meurs ». Ça, c’est numéro un.
    Mon numéro deux sera plus trash. J’apprécie beaucoup la photo de la Ciccone : le vêtement est classieux, pas trop serré aux jointures. Son maquillage est ajusté et son visage élégant. Elle a des yeux splendides et des jambes de rêve. Dommage que la bouteille gâche tout. Sinon, des vieux comme cela, on préfère les voir sur des pubs qu’à la maison de retraite. Tu te souviens de l’interview qu’avait fait d’elle Anne Sainclair pour le compte de la télé française ? Monsieur Chirac avait alors dit (en substance) à cette dernière, qui l’interrogeait face à la caméra lors d’une de ces séances de propagande télévisée à la de Gaulle : « Madame Sainclair, j’ai regardé votre interview de Madonna et je tiens à vous dire que celle qui m’a paru la plus intelligente, ce fut elle. Mais la plus séduisante, c’était vous. » Alors, je suggère au propriétaire de l’Angélus – je ne me souviens plus de son nom – qu’il propose à Mme Sainclair de devenir son égérie, avec séance de pose au Sofitel, ce serait sympa, et que par contre il cède Veronica Louise à la Coume Majou, pour justifier notre slogan.

    J’aime

  3. Hervé Lalau

    Merci les gars. Dans le genre canular, ma plus grande fierté reste d’avoir fait passer Eric Boschman pour le vainqueur du concours du Meilleur Sommelier du Monde en 2010, Malgré un texte absolument loufoque (lisez un peu ici http://hlalau.skynetblogs.be/archive/2010/04/18/eric-boschman-elu-meilleur-sommelier-du-monde.html ), le journal le Soir a relayé, et deux ans plus tard, Eric recevait encore des demandes d’accords vins et mets, vu son nouveau statut.
    Ce qui est moins drôle, c’est de se dire que certains journalistes ne vérifient plus rien de ce qui paraît sur le net.

    J’aime

  4. Moi je préfère le radis au beurre de Jean, ça c’était vraiment Top et d’une élégance folle (je le pense vraiment), plus que les dessous un peu ringards de Madonna qui peuvent certes exciter les papis plus que l’Angelus nos papilles.
    Marc

    J’aime

    1. Luc Charlier

      Excellent calembour, Marc. Tu peux le poursuivre avec papi-razzi et papilles rassies.
      Bon, c’est pas tout ça : le temps est merdique-merdique et l’herbe pousse. Quand il pluvine, la débroussailleuse se « bouche » tout le temps (je me comprends) ; avec ce vent en rafales, la machine à dos ne fait aucun travail utile ; et à la cave, il n’y a rien à faire pour le moment (malos en cours) ==> donc, je « fais de l’ordi » et du gras.

      J’aime

    1. C’est plus compliqué à dresser dans une assiette, mais entier c’est plus facile à …
      Je laisse au lecteur le loisir de poursuivre selon ses propres orientations, vu que notre hébergeur n’est guère porté sur le gastro-sexe

      J’aime

  5. jacquestang

    Belle idée, cela permet de donner un rythme à ce blog.
    Le sensationnel s’adresse aux amateurs en manque de sensation.
    Problème de culture bien souvent constaté.
    Tant que vous n’écrivez pas dans Voici, pas de pbs pour moi, en tout cas!

    J’aime

  6. PadreSanguineus

    Histoire vraie qui se déroule quelque part dans le Gers, au changement de saison blé court / blé long vers l’année 2006 par-là. On retrouve un bras – rien d’autre – d’un agriculteur sous la herse rotative (machine à andainer) de son tracteur, moteur toujours en marche … avec le chien dans la cabine. C’est le toutou qui a remis en action – sans le vouloir ? – l’instrument sur la prise de force tandis que le fermier allait « décoincer » quelque chose.
    Autre histoire vraie, moins dramatique.
    Mon ami Michel Ingels achète une Audi Quattro break neuve, au tout début de cette voiture (cherchez pour trouver la date) et sa tante est son courtier d’assurance. Il arrête en Alsace (Schoffit je crois, pas certain) et déguste. Quand il revient, la voiture a dévalé un petit talus et est …. sinistre total, chassis voilé, irréparable au marbre. C’est « Bulle », la chienne maison, qui a par mégarde desserré le frein à main.
    Alors vos sécateurs, hein, tout juste bons à pratiquer des excisions – d’accord, la belle, la pharaonique !

    J’aime

  7. Merci à tous de votre indulgence pour cette provocation. Ce soir, je suis à Tunis. Je lève mon verre de Muscat sec de Kelibia à votre santé. Voilà bien un vin que j’aimerais faire découvrir à plus de gens en France et en Belgique.

    J’aime

  8. Ping : Faut-il une charte de déontologie du critique viticole? – Les 5 du Vin

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.