C’est décidé : par principe, je veux boire naturel !

Non, rassurez-vous, je n’arrête pas tout. Enfin, pas tout de suite. Selon l’humeur, je continuerai mon havane non bio certifié, mon lardo di Colonnata garanti IGP, mon p’tit planteur du soir à base de rhum agricole de la Martinique, mes huîtres de Marennes, mes virées en bagnoles, mes traversées de rues hors de clous, mes tartines de beurre Bordier hors dlc, mes carrés de chocolat Valrhona ou Cluzel et le vin, bien sûr, aliment dont je ne peux me défaire et dont personne d’ailleurs ne cherche à me priver, pas même mon médecin.

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Mais pourtant, un peu comme vous tous je me pose des questions sur mon aliment favori. À l’instar de Jim, l’autre jour, je reviens d’une tournée viticole au cours de laquelle je n’ai pas fait qu’inspecter les vins. Virée qui n’a fait qu’accentuer ma forte envie de nature. Une fois de plus, j’ai pu approcher les vignes comme j’aime le faire : posément, tranquillement. Et je suis sidéré – pour ne pas dire « profondément choqué » comme dirait miser Copé de constater que bon nombre de vignerons traitent encore leurs vignes avec excès pour ne pas dire avec outrance. Oui, j’ai vu des calamités, des choses pas belles du tout, des terres mortes, des sols ruinés et rongés par des décennies de chimie dévastatrice.

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Bon, faut se mettre à leur place. Ils pourraient se contenter d’un maigre 20 hl/ha, peut-être même aller jusqu’à 30 hl/ha. Après tout, c’est le Midi ! Mais non. Certains vignerons que j’ai rencontrés en veulent plus, beaucoup plus, toujours plus. Ils sont dans l’engrenage. Et sont encore une forte majorité. Pourquoi ? Parce que leur banque en demande plus, que le conseiller agricole en veut plus, que le père de famille en veut plus, que l’État en veut plus… Conséquences : les produits de traitements ont encore de beaux jours devant eux, surtout s’ils ne sont pas bio. Les raisons ? Ils sont très efficaces, moins onéreux, et encore plus abordables s’ils sont achetés en contrebande de l’autre côté de la frontière. Franchement inquiétant, certains produits interdits en France car jugés très dangereux sont, dans notre Europe idéale, en vente libre chez nos amis espagnols, par exemple, qui estiment, eux, que ce produit n’est pas aussi risqué que ça, en tout cas pas au point de l’interdire à la vente. À part quelques trublions avertis et responsables, qui le dénonce, qui en parle ?

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L’affaire de la classe d’une école du Blayais contaminée par la dispersion de produits chimiques commence à faire de timides vaguelettes, même si l’état des enfants et de leur maîtresse est à ce jour (qu’en sera-t-il plus tard ?) jugé plutôt rassurant. Reste que l’on sait depuis des années déjà : des études sérieuses montrent un peu partout dans le monde que les pesticides et autres saloperies répandus dans nos vignes et dans nos champs agricoles sont soupçonnés de contaminer nos organismes. À pas lents peut-être, mais suffisamment accélérés pour nous alerter. On sait que nombre de cancers nouveaux se sont multipliés ces dernières décennies dans nos campagnes. Combien de fois faudra-t-il le dire pour que l’on prenne conscience de ces dangers ?

Photo©MichelSmith
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Et pourtant, même en consommant bio, je sais que je prends aussi un risque. Exemple : la petite vigne d’un ami n’est traitée qu’avec des produits admis en agriculture biologique. C’est son credo : il ne veut pas de chimie lourde. Son sol a de l’herbe et on le sent vivant, grouillant de plein de petites bêtes. Or, cette vigne est entourée de vignes archi traitées où l’herbe est grillée, comme brûlée par le napalm, et la terre toute tristounette au point que l’on n’ose même plus s’y assoir pour piqueniquer. À quoi cela servirait-il de certifier bio (en payant cher, au passage) quand on se sait environné de viticulteurs non bio ? Lorsque les voisins traitent, je suppose que leurs produits se trimballent aussi sur les vignes de mon copain. Je bois son vin quand même et avec un plaisir non dissimulé car il est bon et parce que je sais que ses raisins sont sains, malgré tout, même si je n’ai rien pour me le garantir. Mais si je pouvais l’aider financièrement à s’isoler plus encore dans la nature, à se protéger de ses voisins, je le ferais.

Photo©MichelSmith
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Là où je prends une position plus tranchée dans mon choix de vin même quotidien, quitte à me faire traiter de couillon, c’est quand je décide d’acheter le plus possible en bio, de ne boire et manger que bio. Je sais que ce n’est pas la panacée, que se déclarer bio, que le label lui-même n’est pas toujours une garantie. Dans ce cas, fort de ma modeste expérience, je vais plus loin : je ne bois que des vins en provenance de vignerons que je connais et dont j’ai déjà visité le vignoble. Ces vins fiables, je les trouve facilement chez les bons cavistes et les bons restaurants que je fréquente. Et je suis fier de dire que le plus souvent c’est un peu grâce à nous, journalistes, s’ils sont présentés dans ces lieux. Parce que nous avons la chance d’être invités à les découvrir et que nous avons tendance à ne boire (dans le sens de croire aussi) que ce que l’on voit. Les cavistes, eux, n’ont plus cette possibilité faute de temps, de passion parfois et de moyens souvent. Et beaucoup ne se fient qu’à leur instinct en allant rencontrer les vignerons lors d’excursions éclaires dans les salons qui fleurissent un peu partout en France.

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Oui, je sais d’avance ce que vous allez me dire si vous prenez le temps de me lire et de me comprendre : tout cela est bourré de contradictions, pétri de fausses bonnes intentions, noyé dans un océan d’incertitudes. Ça, c’est de la pensée officielle à l’état pur. C’est pourquoi j’accepte d’être pris pour l’ignare de service, pour le mec qui ne comprend rien à rien, l’écolo au cerveau ramollo, celui qui se laisse berner par les salades que lui distillent les vignerons convertis à l’agrobiologie. M’en fiche ! Car, là où je reste persuadé dans mon petit esprit cartésien que le vin que je bois et que j’aime ne nuit pas d’un iota à ma santé, qu’il contribue même à me maintenir sain d’esprit, c’est quand, et je m’excuse de me répéter, je connais et fréquente le domaine qui m’abreuve. Lorsque je sais, par exemple, qu’il est entouré de bois ou de garrigue, que sa biodiversité est non seulement protégée, mais qu’elle est voulue et encouragée par l’homme. Comment ? En entretenant les bois du domaine. En y introduisant des animaux pour paître, moutons, chèvre, vaches, chevaux… En recréant des haies pour que les oiseaux viennent nicher. En favorisant d’autres cultures, comme les céréales, certains légumes ou arbres fruitiers. En introduisant des ruchers. Bien d’autres actions encore. C’est quand je rencontre des vignerons qui sont en harmonie totale avec ce système dans lequel ils ont choisi de vivre que je décide que leurs vins sont recommandables pour mon organisme, pour mes amis proches ou éventuellement pour mes rares lecteurs.

Photo©MichelSmith
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En gros, je me fiche des vins « natures », en revanche je tiens à « boire la nature ».

Photo©MichelSmith
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Cette attitude professionnelle, j’en ai fait mon principe de précaution à moi. Cette subjectivité, c’est ma façon d’être objectif. Y’a pas de secrets, la plupart des grands vignerons que j’ai rencontré dans ma vie de journaliste curieux fonctionnaient aussi dans cet esprit-là. Certains sans même s’en rendre compte tellement leur conduite semblait naturelle, tellement c’était évident chez eux, et ce parfois bien avant que la biodynamie ne vienne mettre l’accent là-dessus et séduire les journalistes en quête de nouveautés.

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Comme d’autres produits même carnivores, comme la pomme que l’on croque au goûter, comme la carotte au goût sucré, le vin n’est bon que lorsqu’il est issu de vignes soignées avec amour et dont la terre a été traitée avec respect. Tous les progrès enregistrés depuis des années allant dans la direction d’une meilleure pratique agricole, d’une meilleure observation de son environnement, vont dans le sens du respect de la plante. Une belle finalité qui mène forcément au respect de l’autre. Et cela n’empêche nullement le progrès, le développement de la technologie, de la science, de la vie. Bien au contraire !

Michel Smith

NB. Et pendant ce temps-là, certains pensent que les cépages génétiquement modifiés pourraient  nous rendre service  dans la lutte  contre les maladies. D’autres pensent le contraire…

20 réflexions sur “C’est décidé : par principe, je veux boire naturel !

  1. Merci Michel. C’est toujours réjouissant de ne pas se sentir seul à penser une chose dont on aimerait qu’elle soit partagée par tous. Vous savez où je travaille, où je tente de faire vivoter mon bar à vins cave librairie. C’est un village en plaine où la cave coopérative compte 180 vignerons. Aucun n’est venu goûter les vins que je propose (bio en majorité, mais pas que), deux ou trois viennent prendre le pastis (je fais aussi dans le café de village), l’un d’ailleurs a un joli surnom : roundup. Il en est deux au moins qui se fournissent en Espagne… Et puis un autre qui, lorsqu’il traite ses vignes prévient les amis pour qu’ils n’aillent pas se promener dans le coin (et les autres qui ne sont pas amis? Et les animaux?). J’essaie de les comprendre, de saisir ce qui les pousse à ça. Moins de travail et plus d’argent, oui. Mais aussi une forme de fatalité : à quoi bon? Mon voisin me polluerait ma vigne. Je ne sais pas ce que la cave coopérative fait pour les sensibiliser aux risques de contamination. Mais je constate quand même qu’aucun n’aime le vin. Sinon, ils en goûteraient, non?

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  2. Marc LEDAN

    Bravo Michel, ton billet d’humeur fait beaucoup de bien, il est salutaire et même porteur d’optimisme. J’aimerais qu’il y ait de nombreux vignerons qui le lisent et, surtout, qui réagissent.
    Santé!

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  3. françoismb

    Ce que j’aime dans votre article , c’est qu’il n’y a pas de sectarisme , simplement du bon sens ! Vous faites un travail d’honnête homme même si parfois je ne partage pas toujours vos réactions enflammées sur Facebook par exemple.On sent votre sincérité !

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  4. georgestruc

    Bravo, M. Michel SMITH, pour ce billet qui raconte des choses censées, tout simplement. Dans mon village vauclusien, il y a de cela plusieurs décennies (j’étais encore jeune…), un commercial très habile avait convaincu les vignerons , à la suite de réunions dites de « sensibilisation », d’acheter et d’utiliser un fongicide redoutable (on ne l’a su qu’après) nommé « ESSO captane 406 ». Prix attractifs et tout le tralala. Vient la vendange et la mise en cuve. Rien ne se passe. Inertie totale. Pas le moindre démarrage de fermentation. Le téléphone diffuse la nouvelle : « et chez toi, que se passe-t-il ? ». Réponse unanime : rien ; téléphone au gérant de la coopérative, sur les 80 000 hectolitres potentiels en cuve, aucun départ de fermentation. Affolement général et achat massif de levures qui ont fait, cette année là, la fortune de « La Littorale » à Béziers. Ce produit infâme avait tout détruit, champignons, moisissures, levures et j’en passe… Et quelques temps après, décès d’un viticulteur qui ne prenait aucune précaution lorsqu’il manipulait des produits dangereux (personne ne portait de masques de gants et de combinaison à cette époque-là).

    Je déguste et consomme beaucoup de vins élaborés à partir de vendanges récoltées sur des parcelle conduites de façon en bio, biodynamie ou simplement de façon raisonnée. Quel bonheur !! Mais je tourne beaucoup dans les vignes du Sud et il m’arrive de surprendre des faussaires du bio qui ont imaginé que cultiver selon ces méthodes consistait à être négligents et à ne pas entretenir les vignes…Quel gâchis ! Il s’agit d’une infime minorité.

    Encore merci pour ces belles envolées, qui tiennent du coup de gueule et de l’amour du beau produit naturel.

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  5. Charles Brodeur

    Bonjour,

    M.Smith, je prends toujours beaucoup de plaisirs à lire vos textes. Il manque de gens comme vous, ici au Québec!

    J’ai entendu dire qu’il y avait une loi européenne qui allait interdire les produits chimiques sur les terrains cultivables en pente. Pour éviter le ruissellement vers les cours d’eau. Qu’en est-il? Est-ce de la poudre (chimique) aux yeux?

    À bientôt.

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  6. mauss

    Monsieur Brodeur :

    Oui : on en a parlé à la TV de cette loi probable. résultat des courses, dans le Gers, cela condamnerait 70 % des champs de maïs. On continue ?

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  7. John

    Ce que vous dites est très intéressant et je suis parfaitement d’accord avec l’idée qu’il faille travailler dans l’agriculture tout en respectant l’environnement mais j’aimerais apporter un ou deux arguments contradictoires. La première des choses est que penser que les viticulteurs non bio traitent tous à outrance est une erreur: étant donné les coûts actuels des produits phytosanitaires croyez bien que les viticulteurs n’inondent pas leur parcelles mais auraient plutôt tendance à traiter moins que ce qu’ils leur est préconisé en laissant parfois certaines maladies attaquer les raisins. Un autre point important est que le cahier des charges en bio est très lourd, les traitements réduits au minimum et donc inévitablement les parcelles en bio souffrent d’attaques de maladies et il est difficile pour les viticulteurs de garder des raisins saints. Ceci dit ce n’est peut être pas plus mal il est normal que le raisin soit légèrement touché par des maladies étant donné la pression importante que subit la vigne. Cependant penser pour autant que le produit que vous buvez est meilleur pour la santé n’est pas forcément vrai même si le raisin vous semble plus naturel. Si ce dernier est touché par des maladies vous pouvez au final vous retrouver avec un vin moins bon pour la santé. Je précise en passant qu’il y a pour les traitements des dates limites d’application avant récolte pour que le raisin en cave ne contienne plus de pesticide. Les traces de pesticides restant disparaissent lors du processus fermentaire (fort dégagement de gaz et de chaleur) il ne reste pas de pesticide dans les bouteilles en conventionnel c’est une idée reçue.

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  8. Je ne suis pas un technicien de la vigne, John, vous l’avez compris et votre intervention m’intéresse au plus haut point. En admettant que les vins ne contiennent pas de pesticides, il reste cependant que des analyses ont démontré que beaucoup d’entre eux en contenaient… et jusque dans certains vins bio. Mais au-delà de cette réflexion, le plus important me semble être dans l’emploi inconsidéré des traitements chimiques. Le vigneron sait qu’il doit désormais se protéger en revêtant une combinaison intégrale, ainsi qu’un masque. Les autres citoyens, eux, ne sont pas protégés et si rarement avertis qu’ils sont exposés à ces pesticides répandus très souvent de manière inconsidérée, le plus souvent sans la moindre préoccupation de la façon dont est ciblé le produit. Dans le village de Calce que je connais bien, petit village viticole des PO, les études effectuées par la mairie ont montré que la nappe phréatique pourtant profonde était polluée par des années d’abus de traitements dans les vignes. Le viticulteur n’est pas le seul à polluer. Le céréalier l’est tout autant et probablement plus, de même que l’arboriculteur.

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  9. John

    Oui c’est évident et ce que je voulais dire c’est que c’est justement l’intérêt incontestable du bio ça pollue moins l’environnement et c’est moins dangereux pour les agriculteurs et pour ceux qui passent à proximité des vignes. J’avais moi aussi entendu parlé de cette école ou les élèves se sont retrouvés avec plusieurs types de pesticides dans les cheveux. Mon propos est qu’il ne faut pas s’imaginer que le vin bio ou nature est réalisé à partir de raisin plus saint et donc automatiquement que le vin est meilleur pour la santé. Je vais vous prendre un exemple concret je connais un viticulteur en bio dont une des parcelles en particulier est attaquée chaque année par l’oïdium (maladie de la vigne voir google image) à un point ou il ne peut plus s’en débarrasser (cette année c’est une catastrophe) . Alors que fait-il? Il a plusieurs options soit il ne ramasse pas (je vous dit pas l’impact économique) soit il ramasse du raisin très malade qui fini dans une bouteille AB soit il achète du raisin mais ceux qui disposent de raisins en grande quantité et en vendent à d’autres viticulteurs ne sont pas les viticulteurs en bio donc raisin non bio et AB écrit sur la bouteille. Ce que je veux dire c’est qu’il ne faut pas faire de raccourcit, il y a des viticulteurs qui travaillent très sérieusement en bio je ne veux surtout pas dire que tous agissent comme le monsieur que je connais, mais je pense au final que les choses sont contrastées. Il ne faut pas s’imaginer que le viticulteur bio se lève le matin et va travailler une fleur à la bouche en chantant avec les oiseaux et que ceux en conventionnels se demandent comment ils vont pouvoir polluer leur vignes et tuer leurs sols. Vous avez en conventionnel des gens très soucieux de l’environnement et qui veillent à polluer le moins possible. Ce qui m’avais frappé c’est l’accroche de votre article: « c »est décide par principe je veux boire naturel » en écrivant cela vous faites justement un raccourcit et je vous déconseille cette démarche car vous allez passer à côté de très bons produits et c’est bien dommage.

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  10. Il faut tendre vers une viticulture biologique : c’est une certitude : la viticulture reste un des premiers consommateurs de pesticides en France. Il y a un lien direct entre la présence de vignobles et la présence de pesticides dans les rivières et dans les nappes phréatiques (même si la présence d’une couche d’argile plus ou moins dense réduit ce risque dans les nappes). La consommation de pesticides dans l’eau est dangereux pour l’homme. Point. Cela n’est pas polémiquable.
    L’Etat se doit de légiférer sur un Bonus/Malus à l’hectare. Cela rendra peut-être nos vins de gros volume moins compétitif sur le marché international mais nous n’avons pas à mettre en péril une partie de la population pour des motivations économiques. C’est un motif de santé publique, d’Ecologie… le ministère de l’agriculture n’a presque rien à voir à cela.

    Cette certitude étant acquise, parlons du vin dans un deuxième temps. Et bien au sujet du vin, j’ai dans ma cave, les meilleurs vins : ceux que je préfère : la moitié sont des bios, la moitié sont des conventionnels.

    Mon goût n’est pas dicté par un idéal écologique : il est mon goût.

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  11. John

    Je suis tout à fait d’accord avec vous il faut tendre vers une viticulture biologique c’est certain. Je suis toutefois étonné que l’aspect économique vous paresse si peu important car si les viticulteurs ne gagnent plus leur vie il vont cesser leur activité si vous êtes de la partie vous savez de quoi je parle. Vous me semblez être en cave particulière vous savez comme moi que le bio représente une niche qu’il a un coût et qu’il est difficile d’envisager que tous les vignobles de France passent en bio. Imaginez la compétition face aux vins internationaux: Chilien, Australien, et autres. Pour rester compétitif certaines caves n’ont pas le choix elles ne peuvent pas se permettre de passer en bio. C’est une réalité économique il y a des emplois en jeux, des vies en jeux je pense qu’il faut prendre cela en considération. Le problème est que l’on est dans un système régit par l’économie, sur le plan idéologique je vous suit mais la réalité des marchés nous rattrape. Pour que tout le monde passe en bio je pense qu’il faut revoir toute la structure économique avec les paramètres actuels selon moi ça ne peut pas fonctionner.

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  12. John Rom-Ii

    Pour rester optimiste je dirais qu’il semble qu’il y ait une forte conscience écologique chez la jeune génération d’agriculteurs on verra les changements que cela amènera.

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  13. C’est décidé pour moi aussi Michel…..je suis 100% d’accord! Et très bien exprimé. Heureusement il y a de plus en plus vignerons chez toi (et chez nous) qui commencent à faire la viticulture bio…. Mais la lutte contre Monsanto et ses amis n’est pas encore fini!

    et à propos – des belles photos dans l’article! 😉

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  14. Thanks Russ ! 😉 Simplement, permets moi de souligner qu’il y a beaucoup de vignerons qui ne sont pas certifiés bio mais qui le sont tout autant par simple considération philosophique. Tu le croiras ou pas, mais j’ai pensé à toi ce matin alors que j’étais face à l’Atlantique. Je viens de vider avec des copains un magnum de Bernard Baudry à Chinon et c’était quelque chose d’éblouissant de franchise et de pureté. Idem avec les vins de Thierry Michon en Vendée chez qui, quelque soit le cépage, on avait une sincérité époustouflante.

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  15. Pour ajouter plus de poids à mon propos, je conseille de lire cet extrait d’article relevé par mon ami Jacques Berthomeau ce matin. On y trouve l’exemple type d’un article rédigé par un journaliste qui a pris le temps de faire son travail de témoin pour une revue à conseiller, la revue XXI. Merci Jacques !
    Qui est Marie-Lys Bibeyran ? link

    « … 35 ans, ouvrière viticole, qui ferraillait pour faire reconnaître la maladie professionnelle de son frère, Denis, par la Mutualité Sociale Agricole (MSA) et le tribunal des affaires de Sécurité Sociale (Tass). Denis, ouvrier viticole, était mort à 47 ans, le 12 octobre 2009, d’un cholangiocarcinome. Ce cancer avait été causé, selon sa sœur, par la manipulation depuis l’âge de 14 ans de pesticides, nom commun regroupant les fongicides, insecticides et herbicides utilisés dans le traitement de la vigne. »

    Je vais me contenter de citations pour vous inciter à lire ce texte qui est un vrai travail d’investigation de journaliste. Il rejoint mes propres préoccupations abordées dans une récente chronique La vigne, le vin, la santé : attention aux effets boomerang ! link

    « Non, aucun ouvrier viticole ne vous parlera. Je ne peux pas vous donner le nom de mon employeur, parce que je le respecte et qu’il me laisse faire. Jamais de remontrances. Je ne peux vous donner presqu’aucun nom, même pas celui de mon compagnon. Ici, vous savez, on ne dit rien de son mal. Non seulement vous êtes malade, mais on vous demande de vous taire. »

    Un toubib taiseux « Hier, il a reçu un ouvrier viticole qui se plaignait de maux de tête, nausées et saignements de nez. Il avait pulvérisé. Le généraliste a demandé : « Avec quel produit ?

    – Ch’ais pas. Y avait une tête de mort sur le bidon, c’est tout »

    Journal de Marie-Lys « Je travaille sur vingt hectares éparpillés sur la commune de Listrac ; nous sommes donc au milieu de plateaux comportant des parcelles appartenant à des dizaines de propriétaires différents. Ils traitent un jour les vignes larges ; l’autre les vignes étroites. Il nous arrive donc de changer de parcelle plusieurs fois dans la journée parce qu’on se retrouve face à face avec un tracteur qui traite dans notre proximité ! Est-ce que vous imaginez devoir inhaler ce mélange sans mot dire, subir cette mise en sursis de votre santé pour 115 euros mensuels ? Est-ce que vous imaginez la culpabilité s’abattre sur vous, lorsque vous rentrez chez vous le soir, à l’idée de transporter toutes ces molécules sur vos vêtements, vos cheveux, votre peau, en imprégner vos enfants ? »

    « 26 septembre, photos prises dans les vignes de Listrac. Nous ne sommes plus qu’à huit jours des vendanges et ça pulvérisait dur aujourd’hui. Au moins trois tracteurs encore cet après-midi. Un grand château listracais qui vendangeait vendredi pulvérisait encore mardi ! Un bon jus de tébuconazole, d’imidaclopride à venir… »

    24 juillet 2010 52 km contre la montre du Tour de France entre Bordeaux et Pauillac, « dans le beau décor des vignobles taillés aux ciseaux de coiffeur » les camping-cars sont là « C’était incroyabl, des centaines de familles attablées, ripaillant, pastis en main, et juste derrière eux, les tracteurs qui pulvérisaient à plein nuages. Ils en ont pris plein les poumons sans broncher ! Si j’ose dire » déclare le toubib susnommé.

    Alain Garrigou, enseignant chercheur au département Hygiène, Sécurité à l’IUT de Bordeaux 1 auditionné par le Sénat en 2012 ( il explore depuis 10 ans les combinaisons de protection des ouvriers viticoles, les gants, les masques, les cabines « étanches » des tracteurs pulvérisateurs et les outils d’épandage.

    « Il n’existe pas de combinaison qui protège de tout. Les industriels savent filtrer que les grosses particules, pas les aérosols. Le passage de pesticides dans la combinaison s’effectue en dix minutes, ils s’accumulent à l’intérieur de celle-ci. La conception du matériel « cabine » réinstallé sur le tracteur est aberrante. Les gants qui manipulent les mélanges des produits à l’extérieur contaminent ensuite tout l’intérieur du tracteur. La matière de la combinaison n’a jamais été testée aux produits phytosanitaires. »

    À noter « le coût humain des pesticides : comment les viticulteurs et les techniciens viticoles français font face au risque » de Christian Nicourt de l’INRA-Yvry-sur-Seine ICI link

    Témoignage « Avant tu remuais les produits, je te jure, même moi… Tu prenais des gouttes de partout, mais les gens s’en foutaient. À la limite, plus tu t’en foutais partout, plus tu étais une référence… Mais plus vous traitez, plus vous arrivez avec le tracteur bleu comme un Schtroumpf, et plus, pour le monde viticole, vous étiez quelqu’un de bien. Et c’est ancré, ça. Ça c’est un truc qui est encore là… (40 ans, 20 ha PO).

    Denis par sa sœur Marie-Lys il « avait la vigne dans le sang ; outre son boulot de salarié pour un patron viticulteur, il possédait comme beaucoup quelques arpents qu’il cultivait avec un incurable amour. Pour boire son propre vin, son vin de table à lui, fait de la magie de ses mains.

    Denis ne prenait jamais de vacances, il n’osait pas s’éloigner de ses rangs de ceps. Et il « bombardait » ses raisins comme l’avait fait son père et son grand-père avant lui, et tous les autres dans la région. Car ici, quand on est pas né de famille de viticulteurs, on n’est pas intégré. Et on ne parle pas aux étrangers »

    Lisez absolument !

    Et qu’on ne vienne pas me dire que je prends parti, je demande simplement que l’on aborde de front le problème « de la France des terroirs, championne d’Europe de la consommation de pesticides : 62 00 tonnes, dont 20% pour la vigne, + 2,7% » C’est tout, mais c’est beaucoup.

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  16. Je ne mange pas bio et je m’en fous un peu car je crois que cette manie actuelle du « bio » simplifie tout en polarisant le monde. Néanmoins je m’approche de mes 68 ans et suis en excellente santé, en tout cas largement assez pour faire mes 60 heures de travail par semaine. Evidemment qu’on ne peut que souhaiter que la terre, et les gens, soient moins pollués et dégradés par des saloperies (qu’ils soient « naturelles » ou pas, car la nature n’est pas toujours bénéfique). Mais John pose des bonnes question ici. Bio ou pas bio n’est pas le sujet. Ce qui l’est, en revanche, est un bon équilibre entre l’homme, la nature et les techniques, sans excès et sans dogmatisme. Quand je déguste un produit (liquide ou solide) ma première demande est qu’il ait bon goût là-dedans, et, accessoirement, que cela ne présente pas de dangers pour ma santé. Il est vrai que c’est la cas pour bon nombre de produits labellisés bio, mais pas pour tous (je parle du goût,; essentiellement, encore que …..). Autrement dit, un seul critère de sélection ne suffit pas.

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  17. Il n’y a pas qu’un seul critère qui vaille. Si on me relis bien, il y en a 3 :
    -Boire en général plutôt bio, ce qui ne veut pas dire que tous les bios sont bons, ce qui revient à instaurer une sorte de principe de précaution, même si celui-ci n’est pas toujours une garantie.
    -Boire de préférence les vins dont je connais et le vigneron, ses vignes et sa philosophie, ce qui est le cas par exemple de Thierry Michon en Vendée d’où je reviens, ou de Luc de Conti (Tour des Gendres) en Bergeracois.
    -Boire non bio éventuellement lorsqu’il s’agit de vignerons sincères et honnêtes, on pourrait dire digne de foi, dont je connais le travail dans la vigne et la volonté d’engraisser sa terre que par engrais naturels, de ne traiter chimiquement qu’en cas de réel besoin. Le cas par exemple d’un Hervé Bizeul.
    Encore une fois, j’estime qu’une viticulture propre va de pair avec l’idée d’une viticulture actuelle et de demain. Que ceux qui utilisent à outrance des produits chimiques dans leurs vignes sont des pollueurs qui devraient traités comme tels.
    On ne doit pas forcément penser qu’à soit, mais aux autres, aux voisins, aux employés, aux consommateurs…

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