La déception fait partie de notre métier, malheureusement

On dit qu’il y a deux professions qui font rêver les non-professionnels, mais dont l’exercice est assez dur (sans de jeu de mots !), et qui n’en sont pas pour autant très bien payées: celle de journaliste du vin et celle d’acteur porno. Je n’ai aucune compétence particulière en ce qui concerne le second métier, mais passons.

En écho à l’excellent article de Marie-Louise Banyols, la semaine dernière, à propos des tribulations d’un acheteur en vin (d’une acheteuse, en l’occurrence), je vais vous faire part d’un phénomène que tous les journalistes du vin connaissent: la déception. La dégustation à l’aveugle est l’approche que je préfère quand cela est possible – elle a aussi le mérite de distancier un peu ce phénomène de déception. Mais cette déception se produit même hors des visites chez les producteurs, où nous dégustons en connaissant parfaitement l’origine et l’auteur d’un vin ou d’une série de vins. Dans ces situations, il faut être capable de garder la tête froide (c’est peut-être aussi ce qui nous lie aux acteurs porno) et faire abstraction de nos préjugés, positifs ou négatifs, envers tel ou tel producteur basé sur des bonnes ou mauvaises expériences passées.

Un exemple va illustrer cet article, et j’ai un peu mauvaise conscience d’en parler car, en général, j’aime beaucoup les vins de ce producteur qui, en plus, me fait l’honneur de m’envoyer une sélection de sa large gamme chaque année (je ne sais pas s’il va continuer). Je le remercie beaucoup pour cette attention, mais je dois dire que le dernier arrivage m’a beaucoup déçu, avec un seul vin sur les 6 dégustés que je recommanderai à un acheteur potentiel. Cela arrive, heureusement assez rarement, mais quand c’est le cas j’estime qu’il est aussi de notre devoir de le dire en donnant les raisons de son jugement négatif. Et, dans ce cas, je n’étais pas seul à avoir des jugements si peu positifs sur une petite série de vins car mon collègue Sébastien Durand-Viel a dégusté les vins avec moi et a eu des sensations semblables.

Le millésime 2014 en Alsace

Ce producteur fait bien les choses et m’a envoyé, avec ses échantillons, un résumé des conditions météorologiques qui ont précédées les vendanges 2014, source des vins dégustés. Hiver doux et ensoleillé avec très peu de neige et une seule journée de gel ; printemps très précoce et premiers débourrements le 25 mars (un mois d’avance sur la date moyenne) ; floraison précoce aussi, fin mai, sous un temps caniculaire et sec qui provoque de la coulure sur certains cépages (muscat et pinot noir) ; les vendanges débutaient le 9 septembre pour les Crémants. Cette année était aussi marqué par l’apparition de la mouche drosophile suzukii qui perce les baies qui doivent ensuite être triées manuellement dans les vignes. Grosses pertes de récolte en conséquence. Fin de vendanges le 15 octobre.

 

Echelle sec/doux

Je note aussi avec satisfaction que les vins de René Muré ont tous adopté l’échelle graduée entre sec et moelleux sur la contre-étiquette, ce qui donne une idée au consommateur du taux de sucre résiduel dans chaque vin. J’aimerais tant que cela soit obligatoire en Alsace!

 

Les vins dégustés

 

Crémant d’Alsace, Grand Millésime 2011

Le nez semble réduit et le vin est ferme, limite dur au palais, avec beaucoup de matière qui semble presque métallique et une forte amertume. Je ne trouve pas ce vin désaltérant, ni très fin. Après un temps d’ouverture il s’est amélioré, mais sans jamais atteindre des sommets. A table, peut-être ?

Ce vin a été vieilli pendant 33 mois sur lattes, dégorgé en janvier 2015 et dosé en Extra-Brut. On n’indique pas les cépages sur le flacon mais le site du producteur nous informe bien: il s’agit de chardonnay et de riesling, les deux issus du Clos Saint Landelin et vinifiés en première fermentation en barriques.

Sylvaner Steinstuck 2014

Vin bouchonné, donc difficile à juger. La capsule à vis s’impose, en Alsace comme ailleurs !

Muscat Steinstuck 2014

Nez aromatique et agréable, typique de ce cépage. La texture en bouche semble un peu herbacée, en revanche, et l’amertume domine en finale. Peu de plaisir donc, à part par son l’aspect olfactif !

Clos Saint Landelin, Riesling, Grand Cru Vorbourg 2014

Je suis très amateur de ce cépage, en général, mais assez exigeant sur le style. En particulier, je rechigne devant des arômes ou saveurs qu’on qualifie souvent « pétrolés ». N’ayant jamais bu du pétrole,  je doute d’ailleurs de la pertinence de ce terme.

Le nez est assez intense et, oui, il a ce type d’arôme qui, je crois,  provient d’un lieu ou climat relativement chaud pour ce cépage. Effectivement, le Vorbourg est très bien exposé et dans le Sud de l’Alsace. Il y a davantage de complexité en bouche, mais la texture me semble herbacée, ce qui je lie aux arômes. L’acidité est puissante mais bien intégrée. Long en bouche, mais très austère pour le moment. Un vin à attendre, car il présente peu de plaisir en ce moment.

Clos Saint Landelin, Pinot Gris, Grand Cru Vorbourg 2014

Robe intense, or/paille. Nez expressif qui rappelle les fruits à noyau avec un peu d’herbes aromatiques. En bouche une forte impression d’amertume arrive assez vite donnant un aspect métallique au toucher. Bonne longueur. Vin puissant mais austère et peu agréable au palais.

Clos Saint Landelin, Muscat Vendanges Tardives, Grand Cru Vorbourg 2014

Voici le seul vin de cette série qui m’a réellement séduit et que je recommanderais à un acheteur potentiel. Le nez est très expressif et fin, évidemment typé par son cépage, mais avec une touche de complexité – genre pain d’épice. En bouche, c’est arrondi, moyennement riche car la richesse naturelle est modulée par une belle amertume. La finale est plus en délicatesse et en fraîcheur. Joli vin de dessert qui n’empâte nullement.

En guise de conclusion

Voilà, j’ai essayé d’être honnête envers mes sensations en dégustant les vins, à la bonne température et dans des bons verres, faut-il le préciser. Cela ne me fais pas plaisir de dire du mal de vins d’un producteur, à fortiori un producteur dont j’ai très souvent loué les qualités. Mais la déception fait partie de notre métier, et il faut toujours l’assumer.

 

David Cobbold

36 réflexions sur “La déception fait partie de notre métier, malheureusement

  1. Legaigneur

    Je me demande s’il est heureux de rédiger un article comme celui-ci après l’envoi d’échantillons. Ces vins dégustés auraient pu être mis en avant dans un article plus général sur l’Alsace par exemple. Là, vous rédigez un article uniquement sur le domaine tout en signifiant le manque de plaisir que les vins vous ont procuré. Cela ne doit pas être facile à encaisser pour le domaine et ne doit pas donner envie à d’autres domaines de le faire.

    Bonne continuation.

    Cédric

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  2. On n’aime pas forcément être éreintés, mais il faut le prendre avec philosophie.
    Voici deux appréciations très flatteuses de mes vins dont je me souviens bien des années plus tard, alors que je pense être très peu rancunier en général (malgré la suite de ce commentaire) et en plus, totalement invexable. Il ne s’agissait pas d’échantillons que j’avais fournis.
    1) Domaine de la Coume Majou – côtes du Roussillon village rouge “cuvée Coume Majou” 2005. « A grosse dominante de grenache noir. Le nez présentait des notes curieuses de goudron, de brûlé, de fruits pas mûrs. La bouche présentait un léger perlant à l’attaque, avec un ensemble peu agréable. Pas de rondeur et une longueur moyenne. »
    Le plumitif était un certain Patrick Maclart, négociant établi en Bourgogne au départ, et sans doute peu versé dans les vins du sud, mais ceci est une supposition de ma part car il considère comme pas mûre une vendange qui titre15 vol% et a été faite au mois d’octobre. Vu que nos routes ne se sont pas croisées depuis un certain temps (jamais en fait), je n’ai pas pu lui faire revoir son jugement. Par contre, ses considérations peu flatteuses sur ma longueur (je veux dire celle de mon vin) resserrent le lien avec l’autre profession que David Cobbold citait.
    2) Coume Majou, rosé 2008. « The Coume Majou was awful and stinky ». L’auteur est Jonathan Hesford, partenaire de Rachel Treolar au domaine Treolar, à Trouillas. Il commentait une série de rosés des collègues du département sur son blog. On sait que les Anglo-Saxons – je crois que le couple est néo-zélando-états-unien – mettent toujours beaucoup de nuance et de modération dans leur façon de s’exprimer. David le confirmera. Ne sachant pas qui j’étais, il est venu au dégustoir quelque temps plus tard mais je lui ai expliqué que je ne pensais pas qu’il aimerait les vins. Il a paru interloqué et nous en sommes restés là. Par contre, je n’ai rien entendu de croustillant sur sa vie sexuelle, David. Je ne sais pas si le porno l’intéresse. Je peux me renseigner pour t’être agréable.

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    1. Patrick Maclart est revenu au jour j’ai vu.

      Sinon il est difficile pour (certains) dégustateurs de remettre un avis négatif, tant cela va à l’encontre du système établi. Dans le cas présent, l’effet jeunesse du millséime joue certainement pas mal. Des vins de terroir, ayant des matières assez fortes, qui se goutent difficilement dans leur jeunesse (et si je ne me trompe ’14 en Alsace fait partie de ces millésimes qui prennent un peu de temps à se faire) se transfigurent parfois même totalement en l’espace de 2 ans.

      Le grand intérêt serait de regouter ces flacons en ’18 et voir ce qu’il en est.

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    2. Hervé LALAU

      « Awful and stinky ». Voila qui est assez général pour convenir à énormément de vins – ou de cidres, ou de bières, ou de fromages, ou de moules, ou que sais-je? Je vais le mettre en réserve pour le jour où j’aurai perdu le goût, ou quand j’aurai trop la flemme…

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  3. mauss

    @ David : tu as aussi reçu le pinot noir ? Voilà un cru, chez Muré dont j’ai acquis, pour le millésime 2013, 36 bouteilles tant je l’avais trouvé beau sur place. Et je ne suis pas déçu : euphémisme…
    Comme toi, j’ai reçu cette caisse annuelle qui est quelque part plus qu’un beau geste de la part de cette propriété. J’attends toujours un certain temps avant de les déguster.
    Crois bien que cette famille a parfaitement conscience qu’il peut y avoir effectivement des articles comme le tien. C’est toujours un choc, certes, mais ce ne sera certainement pas une raison pour eux de t’écarter des prochaines listes : ce serait une réaction de belle médiocrité.
    Enfin, sois également sûr que Véronique va dare-dare re-goûter ces vins pour comprendre tes commentaires. Ton nom est suffisamment propre dans le monde de la critique pour que tes commentaires soient pris avec sérieux. Et on sait que cette catégorie est plutôt rare… 🙂

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  4. Michel JEAN

    Cela n’a aucun sens de parler de dégustation, d’appréciation, « vin » et oublier de signaler ou de préciser que avec cette boisson chacun y trouve avec son objectivité ( parfois) (insincère) ce qu’il veut bien y découvrir. Boire une bouteille de vin qui se trouve sur une table sans avoir piétiner/marcher dans la vigne et sans avoir rencontrer les vignerons!… reste un jugement de peu de valeur.

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  5. georgestruc

    Les arômes « pétrolés » ne sont pas l’apanage du cépage Riesling ; il m’est arrivé, à ma grande surprise, de le trouver sur de vieux Condrieu. Les molécules responsables de cette caractéristique sont proches de celles qui constituent les hydrocarbures aromatiques monocycliques, comme le benzène et ses dérivés (Ethylbenzène, Toluène, Xylène – les BTEX). Elles ne contiennent aucun atome de soufre (uniquement carbone et hydrogène), avec substitution possible d’un H par un hydroxyle (OH).

    Les huiles extraites par forage, ou encore les roches mères d’hydrocarbures, sont riches en molécules aromatiques dont l’odeur est très agréable, tout au moins dans la plupart des cas. Le pb survient lorsqu’elles sont dans le vin…Personne n’a jamais analysé ce qu’il en était dans le vin et s’il existait une possible « ressemblance » (confusion) entre les hydrocarbures aromatiques et des molécules un peu complexes dans lesquelles se trouverait insérée une fonction thiol (soufre). Pas commode…

    Curieuse coïncidence : des exploitations d’huile existaient en Alsace, au nord du département du Bas Rhin, à Pechelbronn, depuis le XVème siècle. On y extrayait par galeries de mines des roches d’où suintait une huile dont la viscosité pouvait aller jusqu’à celle des bitumes (fermeture avant 1970). Les lubrifiants pour moteur « Antar » étaient fabriqués à partir des huile brutes de Pechelbronn.

    D’ici que le Riesling soit captateur des molécules échappées de ces anciennes mines…Quel événement !! Cela dépasserait les arômes d’Eucalyptus détectés dans les syrah d’Australie…

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    1. A l’inverse de David, dont on connaît l’aversion absolue pour ces côtés « Petrolgeschmeck », ils me plaisent quelquefois. Le souvenir le plus marquant fut un « Saint-Hune » (le Rosacker de Hunawihr en fait) 1976 dégusté avec des amis dans l’ancien restaurant « Les Trois Marches » du chef Vié, avant son déménagement. Nous revenions d’une large virée au salon des caves particulières, qui se tenait porte de Champerret. Le sommelier nous avait prévenus. C’est la moindre des choses.
      Comme M. Truc, j’ai déjà connu ce phénomène sur des Condrieu anciens, ceux de M. Vernay (du temps du papa, je ne connais pas Christine), sur du Montlouis, sur beaucoup de vins de Deiss, sur du Grüner Veltliner, et aussi sur des « Sancerre vendanges tardives », ces sauvignons en surmaturité comme il s’en est produit en 1990 par exemple.
      Pour l’anecdote, le « vendeur » des Ets. Bourgeois emporte toujours avec lui des pierres provenant de parcelles à silex (les « flint stones ») et les frappe en faisant grand bruit. Il produit ainsi des … étincelles et une odeur qui tient un peu de l’ozone (comme par temps d’éclairs) et un peu du méthane, avec également un côté sulfureux. Il dit qu’on retrouve ces arômes dans le vin. Avec tout le respect que je porte à Arnaud Bourgeois et à sa famille, il ne faut pas toujours croire ce que racontent les vendeurs.
      Certains vignerons de Puligny et Chassagne vous font gober que les « pêches de vigne » qui poussent parfois en bordure de parcelle confèrent à leur blanc certains arômes délicats. Ils attribuent cela à la pollinisation croisée des espèces. Il est bien connu que les pêchers fleurissent en même temps que la vigne, en dehors de toutes les autres invraisemblances. On sait bien également qu’Uranus et Saturne, dans la bonne configuration, protègent le prunelart des effets du mildiou!
      Chez l’être humain (c’est mon frère le véto, pas moi), quand la testostérone, ou ses analogues pris à des buts de dopage, subissent une aromatisation, ils produisent des … oestrogènes! C’est notamment le cas lors de l’arrêt ou de la diminution de la prise (on ne peut pas être « au top » tout le temps). C’est sans doute pour cette raison que les footballeurs se roulent par terre de douleur au moindre contact. Ils se conduisent alors comme des fillettes. D’ailleurs, cela ne sent pas « le mâle » dans leurs vestiaires! Plus sérieusement, leurs entraîneurs leurs fourguent aussi ce qu’on appelle des « inhibiteurs d’aromatisation » pour atténuer ce phénomène. Bon, j’arrête, on va m’asccuser de … pétroler!

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    2. Mon cher Georges, ce sont d’ailleurs les Alsaciens qui ont inventés le baril toujours en fonction pour calculer l’unité pétrolière. Quant à l’odeur d’hydrocarbure, c’est comme celle de la truffe blanche, un soupçon ça va, après ça devient horrible, du moins pour moi, je déteste, mais y en beaucoup qui aiment…
      Marco

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      1. georgestruc

        Oui Marco, cette famille d’odeur des truffes en général peut devenir très dérangeante ; ce sont des molécules qui subissent des « complexifications » et aboutir à des arômes désagréables d’hydrocarbures ou d’éther ; l’une des espèces de truffe noire, la brutale, est caractérisée par cela et on se sert de ce critère pour détecter une tentative de fraude sur les marchés ; peu de gens aiment cela ; après, tout dépend de la façon de les consommer ; dans une préparation soumise à la cuisson (procédé souvent barbare s’agissant des truffes) ces molécules sont cassées et l’odeur disparait.

        Vive le baril alsacien !! J’ai appris quelques chose, merci.

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  6. Je me suis abstenu de commentaires sur vos commentaires jusqu’à maintenant, mais je tiens à dire deux à trois choses.

    1). J’ai longtemps réfléchi avant de publier cet article. Cela ne me fait nullement plaisir de l’avoir fait et je ne sais toujours pas si j’ai eu raison.
    2). Comme je l’ai souligné, j’ai presque toujours (beaucoup) aimé les vins du Domaine René Muré et (ceci est pour la personne qui a dit qu’in n’avait pas le droit de parler d’un producteur de vin sans avoir foulé la terre des ses vignes !!!!à et j’ai visité le domaine et le vignoble. Mais, « qui aime bien châtie bien » : il faut que la critique soit libre, honnête et justifiée. On ne peux pas dire que du bien des tous les vins quand même !
    3). François. Non, le Pinot Noir ne faisait pas partie de ce lot de vins. J’ai parlé (en bien) il y a peu de leur Pinot Noir.
    4). Il est très probable que ce millésime ne se manifeste pas bien en ce moment et je redégusterai bien les vins d’ici quelques temps. Mais il sont sur le marché, et il faut bien y porter un jugement.

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    1. Martin Lamy

      Ils ne sont pas encore sur le marché mais ils ont pu être récupérés par ceux qui les ont commandés en primeur et qui n’ont pas forcément votre vision de ce millésime mon cher monsieur. Vous faîtes ici littéralement un procès immonde à ce producteur et votre argumentaire se base sur une dégustation réalisée dans une période où les habitués du domaine savent pertinemment que de nombreux vins ne peuvent pas s exprimer correctement. Cher monsieur ne croyez vous pas qu une discussion au préalable avec la famille Muré aurait été appropriée avant de poster un jugement qui ne peut hélas que nuire à la réputation du producteur. Hé oui au 21eme siècle le consommateur lambda cherche des informations, des notes… avant d acheter un vin ou visiter un domaine.

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      1. 1) Imaginez que tous les vins aient été trouvés délicieux (avec les mêmes restrictions de subjectivité du goût, de date précoce après la mise etc …), personne n’aurait rien trouvé à redire et personne n’aurait suggéré qu’il faut d’abord demander l’avis du producteur. Est-ce logique?
        2) Sans vouloir vexer David, je suis sûr que certains tiennent compte des avis de ce blog (moi par exemple), mais je ne pense pas que beaucoup s’abstiendraient d’acheter ceci ou ça simplement pour cette raison.
        3) Donc, un avis qui flatte, ça va. Mais un avis qui émet des réserves, ça dérange. On peut « utiliser » les prescripteurs à son avantage, mais il faut les fustiger quand le vent est contraire. André Domine (journaliste vin respectable et respecté) a vraiment raison: « La France est le seul pays de l’UE qui n’a pas encore fait la révolution française ». Le journalisme de cour a encore de beaux jours devant lui.
        4) Relisez le texte. Il n’est certes pas élogieux, mais il est mesuré dans son expression.
        5) Je précise que je porte en grande estime le domaine Muré et que mon seul propos est de défendre l’indépendance de jugement et de goût, ainsi que le droit à s’exprimer.
        6) Enfin (et je tente maladroitement d’écouler ma propre production), je conseille aux amateurs de n’acheter qu’un vin qu’ils ont dégusté eux-mêmes (ou un ami fiable). On n’achète pas un chat dans un sac. L’achat en primeurs lui-même est une tromperie de plus du marketing et du système de commerce capitaliste. Le producteur y est obligé car il manque de trésorerie. Le client qui le fait « vole » d’une certaine manière le producteur en lui payant moins que la « valeur réelle » du vin au moment de la mise en marché. Ou alors c’est une rouerie du producteur (ça existe aussi), qui fait croire à sa clientèle qu’il y aura peu de vin, qu’il faut « sauter dessus » car il est exceptionnel etc. Enfin, c’est une manière pour certains acheteurs de stocker à bon compte du vin supposé devoir « augmenter », pour le revendre au prix fort après. C’est de la spéculation, sur le dos du producteur, une fois encore.

        Cela étant, M. Lamy, votre point de vue est partagé par beaucoup de monde et il est parfaitement respectable. On peut être en désaccord avec quelqu’un sans pour autant le vouer aux gémonies. « procès immonde » me paraît pour le moins exagéré.

        La France a l’habitude des dicotomies; catho/laïc, gauche/droite, rugby XV/jeu à XIII, étranger/français. La vrai vie est plus complexe que cela.

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  7. Martin Lamy

    Monsieur Charlier, pour reprendre vos points :

    1 – En ce qui concerne l’avis du producteur je pense que lorsque vous recevez des échantillons gratuitement tous les ans d’un domaine qui vous fait confiance et que vous en êtes régulièrement satisfait alors pour moi oui ce serait logique d’avoir au préalable une discussion avec lui. 2014 n’a pas été un cadeau pour les vignerons d’Alsace et ce millésime demandera du temps pour s’affirmer, l’avis de la famille Muré à ce sujet m’intéresse. Je ne prétend pas avoir la boule cristal mais combien de millésimes/bouteilles ont été décriés par la presse spécialisée et se sont avérés transcendés après quelques années. Je pense pour ma part que ce sera le cas pour 2014.

    2 – Je n’ai jamais vraiment compris qu’une personne puisse baser ses achats sur une dégustation réalisée par une autre personne. Les goûts et les couleurs… Malheureusement une fois de plus combien de vignerons me disent que les gens ne goutent (presque) plus et ne sont intéressés que par les étiquettes. Certains viennent même avec la critique imprimée pour demander des bouteilles !

    3 – André Dominé : je respecte la personne et l’ensemble de son oeuvre mais en ce qui concerne la révolution francaise il ferait bien mieux de la revendiquer dans son propre pays. Je n’ai rien contre les avis qui dérangent dans la mesure où ils respectent une certaine neutralité mais ce genre de phrase « je recommanderais à un acheteur potentiel » est tout à fait apte à influencer.

    4 – Heureusement qu’il est mesuré c’est bien le moins qu’il puisse faire… mais ce ne sont que des tournures de phrase de facon à mieux faire avaler la pilule. Le mal est fait.

    5 – On est d’accord mais la critique doit être constructive.

    6 – Hé oui le système primeur est mal fait mais il permet au consommateur averti d’y trouver son compte en payant des bouteilles à prix réduits. Pour généraliser quand on voit la spéculation dans certaines régions ce sont de nombreux amateurs/connaisseurs qui ne peuvent plus aujourd’hui acheter de vin par manque de finances. Je trouve que ce système est un système de confiance établi entre un producteur et ses clients si le client accepte de recevoir parfois des bouteilles qui ne sont pas au niveau espéré (selon ses propres critères). En revanche, sur d’autres millésimes, il aura des bouteille d’anthologie qu’il n’aurait pas pu avoir/acheter en étant un client de passage qui ne s’intéresse qu’aux soit disant « grands millésimes ». J’estime pour ma part que le jeu en vaut la chandelle.

    J’ai un peu exagéré quant au « procès immonde » mais cette tendance qu’on les anglo-saxons à nous casser du sucre sur le dos à la moindre occasion m’exaspère (je félicite cependant l’auteur pour son niveau de francais et son amour pour notre culture). J’ai pu lire dernièrement que les anglais vantent leurs mousseux qui seraient au niveau de nos grands champagnes. J’attend avec impatience la critique !

    Merci pour la discussion.

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  8. Michel JEAN

    Oui bien sûr que le droit d’exprimer son point de vue est une belle ou bonne chose à propos de tout ou de vin. Ce que je voudrais préciser avant tout c’est la finesse de votre commentaire gagnant qui mérite plus d’être lu mais aussi perdu… Perso j’aime à croire qu’un vin comme beaucoup de nos semblables gagne à décanter, vieillir quelques mois ou plus et être courtiser avec justesse par prudence. Merci pour tout.

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  9. Je suis quand même assez surpris par la virulence et/ou de la teneur de certains des propos, ici ou sur le blog de Luc (que je remercie pour son soutien très raisonné). La question en jeu, me semble-t-il, touche à la liberté d’opinion et, dans ce cas précis, de celle de l’exprimer. Le fait que je travaille dans le monde du vin à plein temps depuis plus de 30 ans ne me donne pas tous les droits, mais m’a procuré une certaine expérience et assez de recul pour me permettre, de temps en temps, un jugement un tant soit peu sévère.

    Je ne suis pas (encore) français, d’accord. Mais qu’est-ce que cela change? Seuls les français sont-ils autorisés à critiquer les vins de leur pays d’origine. A la fin je me fiche des nations et tout cela. Le goût est une affaire de tous les humains et chacun doit pouvoir, avec raisonnement des propos, défendre son propre ressenti dans ce domaine.

    Un point essentiel est oublié par certains commentateurs : la notion de relativité. J’ai bien dit que les vins de Muré sont généralement bons ou très bons à mon avis. Cette série l’est beaucoup moins, et toujours à mon avis. Ou est le mal dans cela, et qu’est-ce que cela aurait changé si j’avais parlé des vins avec le producteur avant d’écrire ?

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  10. Legaigneur

    Bonjour David,
    Les commentaires sont en effet contrastés mais beaucoup vous soutiennent dans votre démarche. Il est évident que votre critique est sincère et mesurée mais qu’elle porte un coup dur au domaine. Je m’étonne néanmoins de la virulence de certains commentaires que je trouve excessifs.
    C’est toujours un grand plaisir de lire vos articles.
    Cédric

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  11. Ping : M. Propre et Mr Clean | Les 5 du Vin

  12. Michel JEAN

    Perso il me reste cependant de préciser que toutes critiques étant par essence  » discutable  » le partage des divergences même légèrement teintées et bien que mesurées ne peut être qu’une source d’évolution.

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  13. @vinquebec : donc un consommateur n’a pas le droit d’exprimer un avis contraire à une critique qu’il juge injuste ? Vous tombez dans le piège que vous dénoncez.

    @Marc André Gagnon : on peut aimer et être critique c’est tout à fait compatible.

    Je suis d’accord avec monsieur Cobbold pour dire que la critique doit être prise avec beaucoup de recul. Mais je trouve que cette phrase « Voici le seul vin de cette série qui m’a réellement séduit et que je recommanderais à un acheteur potentiel » dépasse le rôle du critique car elle cible directement les acheteurs. Seul le vin avec ses qualités et ses défauts (au sens du critique) devrait être mentionné.

    On peut discuter aussi de « La capsule à vis s’impose ». Je ne comprend pas qu’un amoureux du vin puisse écrire cela… quand on ouvre une bouteille de vin on n’ouvre pas une bouteille de coca-cola.

    Cordialement

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    1. Monsieur Lamy, c’est un peu hors sujet mais vous devriez vous renseigner concernant l’obturation des bouteilles par d’autres procédés que le liège, comme vous devriez peut-être vous renseigner sur la qualité des effervescents ailleurs dans le monde (et dans les îles britanniques par exemple. Je ne parle pas des Falklands!). Les champagnes n’ont souvent de « grands » que leur budget marketing et votre exemple est mal choisi: David a été un très loyal et fidèle serviteur de la grande maison « Veuve Cliquot »! En outre, je n’ai jamais vu une bouteille de coca cola en verre obturée par une capsule à vis adaptée avec précision et possédant un joint (il en existe plusieurs types) et qu’on garderait plusieurs décennies en cave. Il me semble que pour vous, il y a la France et puis le reste du monde et que vos certitudes franco-françaises obscurcissent un peu votre jugement. Il faut mettre en doute ses certitudes, questionner ses propres convictions. Et, in fine, on n’est pas obligé de changer d’avis, mais au moins, on a appris quelque chose, M. Lamy. Vous pouvez me reprocher d’être « patronizing », un mot anglais exprimant une notion à mi-chemin entre « péroraison » et « paternalisme », mais je suis très heureux d’avoir l’occasion d’échanger avec vous. Vous semblez tellement assuré dans vos opinions, même quand elles ne reposent sur rien. J’aurais beaucoup de plaisir à être un de vos contradicteurs courtois, mais je n’aimerais pas être votre subordonné ou votre employé. Ca ne doit pas être facile.

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  14. Monsieur Lamy, lorsque vous aurez ouvert autant de bouteilles de vin que moi, et constaté la proportion trop élevée de ces flacons bouchonnés au liège massif qui sont soit totalement abimés, soit sérieusement diminués par du TCA ou, pire cr plus fréquent, par une oxydation variable, vous aurez peut-être un autre avis à propos de la capsule à vis. Comme Luc Charlier fait justement remarquer, c’est bien le « crown cap » qui ferme les bouteille de Coca Cola et non pas la capsule à vis. Mais ce « crown cap » est aussi utilisé pour la quasi-totalité des bouteilles de Champagne pendant leur phases prise de mousse et vieillissement sur lattes, y compris les plus prestigieux.

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  15. Tous les vignerons sont victimes du TCA… Ce n’est pas de leur fait.
    Une déception à l’aveugle, on dira que c’est une vraie déception
    Mais quand ce n’est pas à l’aveugle, c’est une fausse déception.

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