Pour en finir avec Vinobusiness

Retour sur Vinobusiness d’Isabelle Saporta, dont, après avoir lu la version papier, nous avons pu regarder lundi dernier la version télévisée, sur France 3.

Selon les données de Médiamétrie, cette émission n’a pas eu un énorme succès d’audience: 1.203.000 personnes. C’est plus que ce blog, bien sûr. Mais ça ne représente tout de même que 4,8% des téléspectateurs français. A peine plus que la n-ieme rediffusion d’Indiana Jones 3, sur W9, le même soir. Comparaison n’est pas raison. Un documentaire n’est pas un film de fiction… quoique.

Je ne vais pas vous faire croire que ce score m’attriste. Les approximations de Mme Saporta, sa façon de faire passer ses engagements pour des réalités m’insupportent. Les libertés qu’elle prend avec les faits finissent par discréditer les positions avec lesquelles je peux être en accord avec elle – et il y en a. C’est dommage.

A certains, il suffit d’avoir les mêmes adversaires, la même idéologie pour cautionner toutes sorte de raccourcis, d’amalgames – « si c’est pour la bonne cause ». Moi, je n’ai pas de cause.

Je n’ai pas de compte à régler non plus. Je ne casse pas du nanti, par exemple. Tout au plus me permettrai-je de dire, quand je le pense, que tel vin est trop cher pour ce que j’en goûte.

Je ne me sens pas non plus obligé de regretter la disparition d’une coopérative ou d’une cave particulière qui n’a jamais produit autre chose que du jaja de bas étage, au motif que c’est une coopérative ou une cave particulière et qu’elle fournissait de l’emploi. Il y a d’autres métiers que celui de vigneron, le mieux pour en vivre est de bien les exercer. Pas plus que M. Macron ne doit occulter l’existence de l’illettrisme dans le monde ouvrier, je ne pense devoir occulter le fait que la France ne produit pas que du bon vin. Ce serait un mauvais service à rendre à mon lecteur. Je me demande même s’il n’est pas plus important de dénoncer la mauvaise qualité de trop de vins de base qui portent l’AOC, plutôt que les extravagances de la communication ou de la tarification de grands crus que personne ne boit.

Je ne suis ni avocat, ni procureur. Je ne suis que journaliste. Je n’ai aucun engagement. A priori, c’est difficilement conciliable, d’ailleurs – sauf dans une conception pseudomarxiste que j’estime dévoyée. Mais cela dépasse le cadre de cette chronique.

Quoi qu’il en soit , il y a quand même deux, voire trois façons d’analyser ces chiffres d’audience.

La première explication, ce serait que cette faible audience (relative) ait été inversement proportionnelle à la qualité du travail effectué. L’idée, ce serait que ce travail ne peut pas être apprécié à sa juste valeur par tout le monde. L’idée, ce serait de laisser la masse regarder Les Experts. Et de laisser les experts regarder Vinobusiness. C’est un peu élitiste, d’accord, comme raisonnement, mais ça se défend. Sauf bien sûr, si le reportage a un côté démagogique. Parce que là, on aurait loupé la cible.

La seconde explication, ce serait que le vin n’intéresse plus les Français. « Le vin, combien de divisions? » Combien de buveurs réguliers? Combien d’abstinents complets? Combien de gens qui se fichent de la « boisson de papa »? Combien qui pensent le premier verre de vin provoque le cancer? Combien qui pensent que le vin est une addiction au même titre que l’héroïne? Combien qui pensent que c’est une aliénation occidentale?
Et combien de buveurs de gros rouge qui tache, qui se moquent donc bien des problèmes des grands crus?

La troisième explication, pour moi la plus encourageante, serait que les spectateurs se soient détournés du reportage à cause de ses outrances. Je n’ose y croire.

Ce qui me désole le plus, en fait, c’est que les rares occasions où l’on parle du vin à la télévision française soient gâchées par des présentations aussi négatives. Je sais bien que les gens ne s’intéressent guère aux trains qui arrivent à l’heure, mais peut-être pourrait-on trouver un moyen terme?

Sans demander qu’on tombe dans l’hagiographie, sans demander qu’on tresse des couronnes aux vignerons et à tout ce qui touche la vigne, de près ou de loin; ni qu’on occulte les travers de nos appellations, de notre exception culturelle viticole française, et ce, à tous les étages de la hiérarchie, il y a peut-être autre chose à montrer que  Vinobusiness, non?

Hervé Lalau

31 réflexions sur “Pour en finir avec Vinobusiness

  1. Bonjour je ne suis pas du tout d’accord avec vous…..Je n’ai pas envie de perdre mon énergie afin de rédiger un article contre vous….Cela n’est pas mon but. Mon but est de fédérer et de vous faire comprendre que ce qu’à fait Saporta même si il y a des erreurs est un bon début. Notre ennemi sont à la fois les sodas qui détournent les jeunes du vin et les produits chimiques qui tuent les agriculteurs. Si vous aimez lire, je vous conseille de lire ceci….Ce n’est pas de moi mais de Guillaume Pire viticulteur à La fosse sèche à saumur. Cela résume bien la situation…….

    « De nombreuses faiblesses,répondre partiellement,une position très militante,caricature,point faible,un certain nombre d’approximations,d’inexactitudes,totalement faux,une vision manichéenne du vignoble,une vision un peu courte et terriblement réductrice du milieu ».
    Voici quelques qualificatifs utilisés pour ou plutôt contre le film d’Isabelle par peut-être la plus célèbre revue sur le vin en France…enfin, celle qui fait je pense le plus de tirage.C’est incroyable mais je ne suis pas surpris. Certains journalistes ne supportent pas que l’on juge leurs travail alors qu’ils font ça tous les jours avec nous mais ça, c’est normal !!! Et Isabelle dit des choses qui dérangent ces mêmes journalistes car eux n’ont jamais eu le courage de mettre les pieds dans le plat comme elle l’a fait avec peut-être quelques approximations et alors…ce n’est pas ça qui compte. Seuls les pros peuvent s’en rendre compte. Le but d’Isabelle était de montrer ce qui se passe dans le monde du vin et elle l’a bien fait.Isabelle dénonce tous ces courtisans qui font partie du système et elle a raison.Une réaction plus positive de la part de la presse spécialisée aurait été surprenante mais aurait aussi montré que les choses pouvaient changer. J’ai lu un autre commentaire beaucoup plus intéressant mais pas écrit par un journaliste professionnel. Le voici:
    « Moi qui pensait qu’il fallait démocratiser le vin. Que le vin était bonheur et partage. Depuis hier je m’aperçois qu’une petite caste de blogueurs, pseudos spécialistes et journalistes autoproclamés font tout pour garder leur « trésor » rien qu’à eux.
    En effet au lieu de se réjouir qu’un reportage, si imparfait soit il, fut diffusé en prime sur la télé française ils préfèrent crier au scandale.
    Mais quel scandale? Celui de ne pas être assez précis voir démago, celui d’opposer industriel du vin et wine maker aux petits vignerons réalisant des vins a leur image? celui d’opposer bio et chimiste? Et alors… où est le problème?
    Le but de ce reportage était de sensibiliser le GRAND PUBLIC sur plusieurs points :
    – les abus de pesticides et autres produits chimiques
    – le rôle des winemaker et des industriels dans la standardisation des vins (n’en déplaise à certain l’utilisation de levure aromatique ou de copeaux n’est pas une légende)
    – inciter le consommateur à s’intéresser à ce qu’il boit et à demander conseil. Voir à aller sur le terrain (avec de très belles images)
    La cible est donc atteinte n’en déplaise à certains. Ce documentaire aurait pu être plus précis, plus pointu, plus technique moins racoleur … France 3 ne l’aurait alors pas acheté faute d’audience potentielle.
    Alors merci Mme Isabelle Saporta pour votre travail, vous avez réussi à traiter un sujet délicat en prime time (un peu moins d’agressivité lors du débat vous aurait rendu service)
    J’invite les polémiqueurs en chef et autres professionnels du vin (qui n’ont rien appris, normal ils n’étaient pas la cible) à arrêter de se lire, de s’écouter, de se regarder le bout des godasses pour prendre un peu de recule et de hauteur sur leur « rôle ». Un peu d’humilité n’a jamais fait de mal c’est même la marque des grands.
    Le vin ne doit pas être élitiste. »
    Isabelle parle aussi de la PAC ( Politique Agricole Commune ) dans son film et dénonce un vrai problème. Les agriculteurs (viticulteurs aussi) les plus riches et les plus pollueurs sont ceux qui touchent le plus. L’éleveur de montagne qui a du mal à joindre les deux bouts mais qui entretien le paysage et permet de diminuer le risque d’avalanches en hiver ou le petit maraîcher bio ne touchent presque rien alors que les céréaliers dans la Beauce où certains riches propriétaires touchent des montants indécents pour par exemple refaire un chai somptueux. Et ces riches propriétaires sont ceux qui utilisent le plus de produits chimiques car l’appât du gain est important. Nous, les vignerons en biodynamie, nous sommes contrôlés au moins une fois par an par un organisme de contrôle indépendant. Si on demandait à consulter un programme de traitement phytosanitaire dans une de ces riches propriété, je peux vous garantir que ça ferait peur. Et ça, les journalistes qui critiquent le travail d’Isabelle ne le condamne pas ouvertement et évitent à chaque fois de cibler ceux qui polluent le plus.Et comme Isabelle Saporta a le courage de le faire,elle,et bien ils se sentent décrédibilisés.
    Il y a encore beaucoup de choses à dire.
    Une autre fois.
    Bonne journée à tous.
    Guilaume Pire

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    1. Merci pour votre réaction.

      Je réfute totalement l’idée d’appartenir à une coterie qui confisquerait le monde du vin et imposerait sa vision – mon but est au contraire de partager mes coups de coeur et mes coups de gueule, d’échanger avec vous. C’est pour cela que les commentaires sont ouverts sur ce blog, c’est aussi pour cela qu’il est gratuit, libre de toute publicité.
      C’est aussi ce qui me permet de répondre franchement à Mme Saporta que contrairement à ce qu’elle dit – et qui me vexe – nous ne sommes pas tous à la botte des grand crus et de l’establishment viticole en général – je ne l’ai pas attendue pour dénoncer les primeurs ni les classements, par exemple.
      Et je le dis dans mon texte: dommage qu’elle défende si mal des positions que je partage.

      Par ailleurs, vous citez un vigneron. Je peux en citer un autre:
      http://blogreignac.blogspot.fr/2014/09/je-suis-un-mad-max-en-puissance.html

      Je ne suis donc effectivement pas d’accord avec vous. Je souhaite seulement que vous me faisiez crédit de ma bonne foi.
      Je pense que la fin ne justifie pas tous les moyens. Pour le choix du sensationnel, le choix des angles, le ton du commentaire, ce reportage n’est pas équilibré.
      Je ne fais pas de politique, je ne parle que de mon métier, de la façon dont je l’exerce, sans nier qu’il puisse y avoir des problèmes par ailleurs.
      Et je trouve que Mme Saporta a bénéficié d’une assez grande exposition médiatique pour que je puisse faire entendre ma petite voix sans avoir l’air de vouloir confisquer la démocratie!

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  2. mauss

    Monsieur Guillaume Pire,

    Vous avez une noblesse de ton dans votre commentaire qui manquait cruellement dans la présentation de Madame Saporta.

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  3. Luc Charlier

    N’ayant pas vu le reportage – pas la télé et la flemme de trouver quelqu’un qui en eût une et souhaitât regarder ce programme – je me garderai de faire un commentaire. Simplement, Hervé Lalau s’approprie ma formule – il a bien raison, je ne défends pas la propriété intellectuelle – concernant le fait que le vin ne sert pas à créer de l’emploi. L’agriculture, dans son ensemble, est un secteur d’activité difficile, très largement subventionné. Si des travailleurs sont maintenus en place alors qu’ils ne se réalisent pas dans ce qu’il font, que leur production est quelconque (ou pire) et qu’ils représentent un coût (direct ou indirect) pour la société, si en plus ils polluent largement, et si en plus leur type de production ne correspond pas à une nécssité vitale (comme le blé, le lait, la viande ….) pourquoi vouloir à tout prix conserver leur nombre intact?
    Bien sûr, si une seule de ces critiques tombe, alors bien sûr, cela a du sens. Certains vignerons ne sont pas subventionnés, polluent très peu, produisent du bon vin et se réalisent dans ce qu’ils font. Alors, full marks! J’en connais au moins un.

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  4. Bien d’accord avec les positions d’Hervé.

    J’ai vu le film de Saporta mais je n’ai pas lu son livre. Et, ayant vu le film, j’ai encore moins envie de lire le livre, tant les amalgames, inexactitudes et visions manichéennes et incomplètes m’ont agacés dans le film; Il y avait pourtant aussi du bon : j’ai trouvé les commentaires de Stéphane Derenoncourt et de Jean-Luc Thunevin, mais aussi du propriétaire à Pomerol, honnêtes et souvent éclairants ou drôles. Les images était belles aussi. Mais que de choses qui ne tenaient pas la route à côté de cela. Dire que Pomerol est majoritairement entre les mains de gros investisseurs est simplement faux. J’ai trouvé bien curieux de choisir, pour représenter la Bourgogne, qu’un seul producteur assez marginale et de soigneusement éviter de mentionner que cette région aussi est frappé de grandes inégalités dans les prix des terrains, et d’achats spéculatifs. Et pas une mention de la rive gauche à Bordeaux (dont certains cas auraient appuyé sa thèse un peu facile), ni des tous les bons vignerons des appellations modestes en Gironde. Et même d’aucune autre région. D’accord, on ne peut pas tout faire dans un docu de 52 minutes, mais quand-même. Quant à la prestation de la dame en question dans le « débat » qui a suivi, on a vite compris : elle n’est capable que de s’écouter elle-même et n’est nullement intéressé par ce que les autres peuvent dire. Insapportable !

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  5. Jean-Charles, je suis d’accord pour dire qu’il y a des journalistes à la solde des grands crus. À la solde aussi des «  »gros capitalistes » du vin. Il n’y a qu’à lire les spéciaux vins de certains titres nationaux pour s’en rendre compte. Mais de là à mettre TOUS les journalistes dans le même panier de crabes, je pense que tu exagères.
    Pour ne parler que de moi, qui suis journaliste dans ce blog collectif depuis plusieurs années, j’ai par deux fois récemment évoqué et de manière forte mon dégoût pour tout emploi de pesticides dans la vigne, mais aussi dans les céréales, les vergers, les potagers, etc.
    Relire ici : https://les5duvin.wordpress.com/2014/03/13/au-fait-pourquoi-ai-je-signe/
    Et ici : https://les5duvin.wordpress.com/2014/05/22/cest-decide-par-principe-je-veux-boire-naturel/
    Par ailleurs, comme d’autres journalistes, je défends et je m’engage par principe pour une viticulture bio (donc aussi biody) tout en soulignant les excès dans ce milieu, excès allant jusqu’à l’emploi en cachette de produits non autorisés et jusqu’à une éthique responsable non ou si peu suivie.
    On pourrait en discuter des heures…
    Je tiens à souligner que nous ne sommes pas tous sur la même longueur d’onde dans ce blog commun, mais que nous sommes pour l’expression libre et que nous défendons le vin dans son ensemble, n’hésitant pas à souligner tout ce qui ne va pas dans ce monde pas toujours net, comme j’ai pu le faire à l’époque de l’affaire du dernier classement de Saint-Émilion.
    Je soutiens donc mon ami Hervé dont le papier du jour m’apparaît nécessaire dans la béatitude qui distingue la plupart des commentaires sur le « cas » Saporta.
    Tu devrais nous lire plus souvent, cela te ferait du bien…

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  6. Je cite JC Botte qui ouvre le débat de ces commentaires : « Notre ennemi sont à la fois les sodas qui détournent les jeunes du vin et les produits chimiques qui tuent les agriculteurs ». Soit dit en passant, ça fait beaucoup pour un seul ennemi. J’ai envie d’ajouter que notre ennemie est la bêtise avec mention quand elle invite la mauvaise foi. D’où les réactions au traitement Insapportable du documentaire en question. Et ma fidélité à ce blog des 5. Merci.

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  7. Ce qui est drôle dans ce genre de débat, qu’il soit ici, à la télé ou encore ailleurs, c’est que ce sont ceux qui se disent honnêtes et qui le sont la plupart du temps qui s’énervent, apportent leur argumentaire, alors que les autres qui existent comme le souligne Michel, les inféodés, les grignoteurs de râteliers, s’en fichent éperdument et nous répondent par une indifférence totale, voire un mépris pour ce genre d’égosillements.
    Pour en revenir à la mini déferlante Sapporta, elle a eu l’opportunité de faire passer un message, certes caricatural, mais il faut à la télé ou en librairie ce genre de ressort pour attirer l’attention des réalisateurs ou du public. Nous , on peut d’égosiller tant qu’on veut, nous ne serons jamais applaudis que par un lectorat restreint sans grand effet de masse.
    Marco

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      1. Pas du tout, mais je pense qu’il est vain de croire, à la Don Quichotte, que s’attaquer à ce qui ressemble comme deux gouttes d’eau aux pratiques de l’ancien régime peut apporter un changement. Quoiqu’un grain de sable peut parfois gripper une machine, même bien huilée.
        Marco

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  8. Matthieu Pibarot

    Le livre et le documentaire ensuite sont des exercices fondamentaux de résistance républicaine.

    La communauté vigneronne n’a pas le droit de refuser de regarder les choses en face. Elle n’a pas le droit de refuser de se remettre en question quand on leur met le nez dans leur magouilles et autres problématiques sanitaires.

    Vivement un deuxième tome !

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  9. Bonjour,

    Je souhaiterais attirer l’attention sur un point: les inexactitudes dans ce reportage. Si il y a bien un monde dans lequel les inexactitudes sont légions, c’est dans celui du vin. D’une part parce que nous sommes loin d’avoir compris toute la magie de ce breuvage, d’autre part parce que c’est un sujet extrêmement complexe et vaste qui ne s’explique pas en deux minutes, et sans doute aussi parce que des raccourcis et de fausses idées circulent et sont relayées en compagnie de faits avérés. Je m’estime totalement passionné par le vin, mais je n’en suis qu’à mes débuts. Je peux parfois me permettre de corriger sans crainte mes proches lorsqu’ils font fausse route en parlant des Abruzes alors qu’ils me font déguster à l’aveugle un Vino Nobile di Montepulciano ou qu’ils sont surpris que je ne reconnaisse rien quand la bouteille a été achetée à 3 francs cinquante à l’hyper-marché du coin, ou quand ils me disent qu’un vin élevé en fût de chêne est forcément meilleur. Mais, faute d’expérience, j’écoute et j’intègre aussi de temps en temps des vérités qui n’en sont pas, que ce soit en provenance de vignerons, de blogueurs ou de journalistes. Je ne tiens absolument pas à excuser Mme Saporta pour les grossiers raccourcis utilisés dans son reportage du style « pluie = bonne excuse pour utiliser des pesticides », c’est inadmissible de la part d’un journaliste d’investigation même si le vin n’est pas son domaine de prédilection. Mais écoutez la majorité des enquêtes et des documentaires qui circulent sur les chaines grand public, peu importe le sujet traité, et vous pourrez en repérer à la pelle, des inepties de la sorte. Quand on sait que c’est erronné, on a tendance à ignorer le reste alors que tout n’est pas forcément à jeter. Prenez le meilleur de ce reportage, et basta. Et si il y a davantage à jeter qu’à garder, ce n’est qu’un peu de temps perdu, il y a pire. Ce qui reste le plus triste selon moi, c’est le débat d’après, à pleurer. Heureusement que nous n’étions que 4,8% à le suivre. Si la télévision était un vecteur d’information fiable de nos jours, ça se saurait. Et tant que la loi Evin est ce qu’elle est, point de louanges pour le vin à la télé. Et sinon, quel goût il a cet Angélus? A-t-il la structure d’un premier grand cru classé A en plus d’un joli parking? Les vins de Dominique Derain sont-ils intéressants? Ce reportage ne m’en dit rien. C’est peut-être pourtant ça qui compte avant tout le reste.

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  10. Je ne dis pas qu’il fallait l’interdire. Seulement qu’on a le droit de critiquer son travail. Quant à la « communauté vigneronne », d’abord, j’ai un petit doute sur le fait qu’elle existe vraiment, mais surtout, bien sûr, ce n’est pas à moi de lui dire ce qu’elle doit penser. A ce propos, Vinobusiness est loin d’avoir fait le tout du sujet. Moi non plus, et pourtant, j’y bosse à temps plein.

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    1. Matthieu Pibarot

      je ne me suis pas prononcé sur une quelconque interdiction. Seul M. de Boüard a voulu une interdiction d’expression. c’est cela qui est problématique.

      VinoBusiness est la critique (imparfaite) d’un système.
      Cette critique doit aussi être confrontée à d’autres avis (et donc critiquée à son tour), c’est ce que nous faisons tous ici (et même ailleurs).

      Personne ne voulait lancer le débat sur l’usage abusif des pesticides, personne ne voulait lancer le débat sur des pratiques de classement éhontées laissant tant de place au copinage, personne ne voulait lancer le débat sur des fusions/acquisitions qui font de « petites vignes » à peine propres à faire du vin un grand Cru classé par un simple paraphe sur un contrat de vente.

      Le débat est lancé, qu’il vive !

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  11. Denis Boireau

    Je croyais que 1,2 million de telespectateurs c’etait un tres gros score pour un documentaire sur une chaine Francaise…peut-etre meme un record.

    Madame Saporta est entendue en dehors de notre petit milieu et la masse d’imperfections, de raccourcis et d’approximations de son propos est necessaire pour ca.
    Vous ne pourrez pas interesser une large audience aux problemes du vin (speculation, pollution, subventions, monopole des AOC, etc) en etant exhaustif et precis.
    Il y aura toujours plus d’audience pour le cirque que pour l’etude des substrats de developpement de Brettanomyces Bruxellensis, par exemple (ce dernier exemple est tire de l’excellente newsletter IVV. Excellente mais surement pas lue par 1,2 million de lecteurs).

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  12. Je tiens à féliciter Julien pour sa manière aussi juste que pondéré d’aborder le sujet du vin, et pas simplement par le petit bout de la lorgnette saportesque. Difficile à croire qu’il n’est qu’à ces débuts dans ce monde passionnante.

    Mathieu, dire que « personne ne voulait lancer le débat sur l’usage abusif des pesticides » est simplement faux. J’ai ai parlé à la radio (In Vino BFM) il y a environ 5 ans, avec chiffres à l’appui. Des magazines de consommateurs ont largement abordé le sujet, ainsi que quelques autres émission de tv racoleuses. Michel souligne qu’il l’a dénoncé sur ce blog. Bien d’autres aussi, ailleurs. Saporta n’a rien découvert du tout et en plus elle mélange tout et n’importe quoi. Dire que des vignerons accueillent la pluie avec la mine réjouie pour pouvoir aller déverser des produits (il s’agit de fongicides et non pas de pesticides comme elle le dit à tort) est simplement ridicule.

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  13. Pour une fois, je ne suis pas d’accord avec toi Hervé. 1 million 200 000 spectateurs c’est énorme pour un reportage sur le vin. Combien de journaux ou de blogs spécialisés peuvent se targuer d’atteindre autant de lecteurs différents en une année, ou même en dix ans? Aucun… Dans mon petit pays reculé, j’ai entendu plusieurs personnes me dire qu’ils avaient vu ce documentaire et que leur vision de Bordeaux en avait été modifiée (en mal).
    Personnellement, je n’ai ni lu le livre, ni vu le film. De mon point de vue, expliquer qu’il y a de la spéculation à Bordeaux, que les grand crus sont une arnaque intellectuelle et les primeurs un show médiatique pour pique-assiettes me semble plutôt enfoncer des portes ouvertes que dévoiler des secrets bien cachés. Bien sûr que les approximations (pluie, grêle et autres) décrédibilisent le propos. Mais comme moi tu dois recevoir tous les jours des communiqués de presse navrants qui t’annoncent fin août que le millésime sera fantastique, que le liège est le meilleur bouchage au monde, que le terroir patati et patata… Et je ne parle pas des âneries qu’on peut lire dans certains médias parce que certains sont incapables de recopier correctement le communiqué de presse. Combien d’articles as-tu pu lire sur des grands châteaux sans que ne soit jamais posé la question de l’agrandissement d’un domaine qui faisait quelques hectares en 1855 et plusieurs dizaines aujourd’hui? Combien d’articles pour expliquer que le rosé ne peut être un mélange de blanc et de rouge, alors que c’est la règle en Champagne?
    Je ne crois pas que l’on puisse honnêtement évacuer ce documentaire d’une revers de la main à cause des approximations, ni considérer que plus d’un million de téléspectateurs constitue une faible audience. A mon avis, c’est au contraire un très bon score, qui devrait même inciter des producteurs de télé à multiplier ce genre d’enquête plus ou moins à charge.

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  14. Tout est relatif, Alexandre, voici ce que dit le site OZAP, qui s’occupe des mesures d’audience:

    France 3 et W9 au coude-à-coude

    France 3 est très faible, au pied du podium, avec son documentaire inédit « Vino Business », sur la viticulture en France. Celui-ci a intéressé 1,2 million de téléspectateurs, soit 4,8% du public de quatre ans et plus. La chaîne publique n’affiche donc que 2.000 téléspectateurs d’écart avec W9, en forme avec le long métrage en rediffusion « Indiana Jones et la dernière croisade ». Ce film américain de Steven Spielberg avec Harrison Ford et Sean Connery affiche par ailleurs une PDA supérieure à celle de France 3 (5,3%).

    D’un autre côté tu as raison, pour un documentaire c’est plutôt bon.
    A moins bien sûr qu’on ne le classe dans la catégorie docufiction?

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    1. georgestruc

      Regardons les choses en face, avec froideur : Mme SAPORTA ne visait qu’un seul objectif, faire du ramdam pour vendre son bouquin et la TV a été bonne fille en lui prêtant l’étrange lucarne à une heure de bonne écoute. Le journalisme d’événement fait son beurre avec ce qui pique, dérange, effraye, émeut. La presque totalité de ce l’on a vu ou écouté concernait Bordeaux, première faute gravissime de la part de quelqu’un qui prétend connaître le monde du vin et parler en son nom. Elle aura réussi (?) mais j’espère que non…à déstabiliser le consommateur moyen en mettant dans le même panier tous les vignerons de la planète (des menteurs, faiseurs de fric avant tout, fraudeurs, falsificateurs, chimistes amateurs, etc.). Le déséquilibre était flagrant. Ce n’est pas du bon boulot, mais un buzz agressif sans objectif cadré et, en plus, sans débat de qualité (minable, le débat). Je m’en veux d’avoir été peut-être le 1 200 000ème téléspectateur à m’être conduit en observateur passif de ce faux « documentaire ». Cependant, il faut bien aussi lire, regarder ou écouter ce qui se dit sur le sujet qui nous passionne tous ; alors, mea culpa. Par contre pas d’accord : ce bouquin, cette émission s’apparenteraient à de la « résistance républicaine » (Matthieu Pibarot) ? Qu’y a t-il de républicain dans ce genre d’opération, sauf à mettre sous les yeux et dans les oreilles d’un public non averti les bases d’un charivari purement opportuniste ? La « res publica » a mieux à recevoir et à donner…

      Allez, les cinq, continuez à prendre votre baluchon et parcourez la planète vin, comme vous le faites si bien depuis des années, sans espérer un jour « passer », comme on dit, à la télé à une heure qualifiée « de grande écoute ». Dieu vous saura gré de cela et, une fois tous la haut, nous formerons des farandoles joyeuses et libatoires autour de vous, tandis qu’à l’instar des grecs anciens nous organiserons des simposions chaque jour, car nous seront tous au paradis et Mme Saporta au-delà du Styx en train de supplier que l’on tende une passerelle au-dessus de cette barrière noirâtre.

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      1. Oui, Georges, vous avez raison. J’ai titré « pour en finir avec Vinobusiness » en me demandant si je devais à nouveau en parler, si je n’allais pas apporter de l’eau à ce moulin. Je me le demande toujours.
        Vivement mercredi prochain, j’essaierai de parler de vin.

        PS. En ce qui me concerne, aucune envie de passer à la télé ni même de faire l’opinion. J’ai trop de mal à me faire la mienne.

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    2. Salut Hervé,
      Ce qui m’étonne tout de même un peu c’est cette volonté de défendre Bordeaux, pas de ta part mais de celle d’autres intervenants sur ce blog ou ailleurs, à tout prix. Comme si la spéculation à outrance de la région était positive pour les vins de la région. Il me semble que pour les 200 ou 300 châteaux qui font des profits faramineux (et qui sont presque tous en mains de multinationales), la très grande majorité des vignerons de la Gironde peine à tourner, si elle n’est pas en train de mourir.
      Je comprendrais cette défense corporatiste si Bordeaux fonctionnait comme la Champagne, où les gros se font des fortunes, mais les petits arrivent très bien à vivre. Or, c’est tout le contraire à Bordeaux, le prix du raisin y est souvent ridicule et en-dessous des coûts de production. De mon point de vue, le système bordelais est à moyen et long terme hyper destructeur pour toute la région. Un peu comme dans le Beaujolais, où la génération d’après-guerre s’est fait des c… en or au prix d’une destruction complète de l’appellation qui est payée par la génération actuelle.
      Bien sûr, c’est un autre sujet…

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      1. Tu pourrais aussi te demander pourquoi Mme Saporta n’a pas ciblé la Champagne ou la Bourgogne. Tu vois, ça marche dans les deux sens.
        Ce que je défends, ce n’est pas Bordeaux, en ce qui me concerne, c’est le principe d’une enquête équilibrée.

        En plus, Bordeaux, c’est vaste, il y a un monde de différence entre les grands crus médiatisés et la base vigneronne qui vivote à leur ombre.

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  15. françoismb

    Ce reportage n’a apporté au grand public que des éléments négatifs sur le vin et ceci retombe sur tous les viticulteurs et l’image du vin en général ! C’était le but recherché et c’est pour cela que le reportage est passé sur une chaîne publique puisque l’Etat est prohibitionniste et entre les mains des lobbys hygiénistes . Penser le contraire est d’une naïveté confondante !!!!

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  16. « Il me semble que pour les 200 ou 300 châteaux qui font des profits faramineux (et qui sont presque tous en mains de multinationales), la très grande majorité des vignerons de la Gironde peine à tourner, si elle n’est pas en train de mourir. »

    Si l’on prend l’exemple de Saint-Emillion, sujet du reportage, il n’y a que deux châteaux sur 18 Premiers GCC qui soient la propriété de « multinationales ». Les autres sont des propriétés familiales. La proportion est plus forte dans le Médoc, mais malgré tout, elles restent minoritaires. Bref, on est dans le cliché total…

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    1. Vous avez raison, je retire le presque tous. J’aurais dû dire de plus en plus ou souvent. De plus, je suis convaincu par votre argumentation, j’étais dans l’aveuglement et je viens de voir la lumière: tous les vignerons de Gironde vivent dans le bonheur le plus parfait, le prix de vente du raisin et du vrac atteint des niveaux suffisants pour permettre aux producteurs de faire vivre leur famille dignement, la spéculation n’existe pas, il est tout à fait normal que l’appellation grand cru soit subordonnée à des histoires de parking et de site internet, sans oublier qu’il n’y a aucun problème de succession.

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      1. Ben voilà, on continue dans la caricature, comme bizarrement tous les défenseurs de Saporta. Je ne dis pas que tout va pour le mieux dans le Bordelais, mais il faut arrêter de penser que tout cela est de la faute des multinationales. Saint-Emilion est composé d petites propriétés qui ne rêveraient que de s’agrandir, sauf que presque personne ne souhaite vendre. Donc les prix grimpent. Faut pas chercher plus loin, mais c’est tellement mieux d’aller chercher des méchants… Le parking, c’était 0,2 % de la note finale, alors bon, faut arrêter de faire un fixe dessus…

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  17. Alexandre, Eric, et si on laissait cette histoire de côté un moment pour parler d’un bon vin? Vous choisissez chacun celui qui vous plaît en ce moment, et on échange nos impressions dessus (Alexandre, si c’est Suisse, voire Valaisan, on ne t’en voudra pas, au contraire!).

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