Encore un petit coup de Suisse, vigne héroïque en Valais

Le Valais offre une viticulture spectaculaire, établie sur les pentes vertigineuses de la rive droite du Rhône oriental pour la majorité. Ce patchwork d’abruptes murailles est bien exposé au sud. Mais quand on croit avoir tout discerné, quelques endroits creusent encore plus fort leur à-pic insensé. Comme la Combe de l’Enfer dont le nom doit plus à la douleur des mollets qu’à Lucifer.

La combe

 

La paroi presque à la verticale regarde le gros village de Fully du haut de ses murets. Elle se dessine en arc de cercle pour mieux s’arcbouter face au vide. Une construction humaine qui remonte déjà à quelques siècles, mais que les hommes entretiennent année après année. Leur ingéniosité a transformé cette ancienne moraine glaciaire pentue à plus de 90% en terrasses viticoles. Quelques vignerons (des encaveurs, comme on dit ici)  se partagent cette raideur minérale considérée comme l’un des meilleurs terroirs de Fully.

Quand Claudine Desfayes a décidé de reprendre quelques parcelles au beau milieu de la combe, son père lui a crié folie ! Mais la passion l’a emporté et aujourd’hui, plus rien à regretter, l’endroit réclame certes une masse importante de travail pénible, mais au vu du résultat, cela en vaut la peine. Elle a été la première à planter, avec la complicité de son mari, Yvon Roduit, le Cornalin et l’Humagne rouge sur ce terrain jusque-là réservé aux cépages blancs. Ils y poussent depuis avec grâce entre 500 et 600 m, le Païen (alias Savagnin) se réserve la partie supérieure du 0,7 ha qu’ils possèdent.

Cornalin Combe d’Enfer 2016 La Rodeline

sdr

 

Le grenat sombre aux reflets améthyste de la robe renvoie l’image de l’abrupte combe au couchant. Il s’en dégage une atmosphère fumée aux accents de confitures de fruits noirs et de réglisse. Il suffit d’y plonger le nez pour en ressentir l’élégance, mais aussi la puissance et la complexité. La bouche le confirme. Tout d’abord la fraîcheur y installe un terrain propice à découvrir le fruit, gelées de mûre, de fraise et d’airelle, relevées de réglisse et de fève de tonka. La saveur subtile du chocolat vient lisser les tanins qui dans leur trame emballe toute la puissance aromatique.

Voilà un Cornalin à la fois aérien et racé au potentiel à peine dévoilé.

Le Cornalin pousse au beau milieu de la combe, à l’endroit où il fait le plus chaud. Le capricieux cépage offre-là un rendement de 600g/m2. Il se cueille bien évidemment à la main vu la pente peu mécanisable. Il est vinifié et élevé en cuve inox. Ce 2016 se boit déjà grâce à la pureté de son fruit, mais sa longueur augure d’un potentiel de garde de plusieurs années.

www.rodeline.ch

Ciao

Marc

 

13 réflexions sur “Encore un petit coup de Suisse, vigne héroïque en Valais

  1. Mais combien vaut une telle bouteille si on paye le travail qu’il y a derrière?
    C’est la première fois que je vois le rendement exprimé en g/m2 mais je n’ai pas beaucoup voyagé. Alors j’ai fait un petit calcul pour l’exprimer en français viticole.
    60gr/m2 soir 600 kg/Ha si on prend une mesure moyenne de 120kg de raisin pour 100L de vin, on obtient 5Hl/Ha. Pour une AOC qui peut produire jusqu’à 96Hl/Ha.
    Marc, dis-moi que je me trompe.

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    1. Paul Bagnoud

      Bonjour Nadine, il manque un zéro pour votre raisonnement , c’était 600 g/m2 , et donc dans les 50 hl/ha.
      Il faut savoir que ce cépage a une forte tendance à l’alternance, dès qu’on dépasse ce rendement. Pour de l’info sur ce cépage, voir les livres de José Vouillamoz avec Giulio Moriondo, et avec Jancis Robinson et J. Harding.
      Réponse à la première question : un peu plus de 23 € , voir http://www.rodeline.ch pour plus de détails.
      Bu récemment un très bon Cornalin à 17 € d’une cave qui n’est pas connue pour sa haute qualité, mais qui n’obtient pas moins de distinctions que d’autres. Et chez un discounter, on en trouve à 9,90 CHF, mais j’évite.

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    2. Nadine

      En fait le travail chez Rodeline se passe surtout en cave et non à la vigne….
      Je ne comprends pas ce papier de Marc. Il est le premier à savoir que d’autre vignerons produisent des vins sur ce terroir, pourquoi implicitement induire les lecteurs français en erreur?
      Il aurait été possible de (re-)parler de M.T. Chappaz, d’Henri Valloton, il aurait été possible de référencer https://www.france.tv/france-3/des-racines-et-des-ailes/39003-vignes-du-valais-et-combe-d-enfer.html mais ne mentionner que Rodeline, là je n’adhère pas du tout.
      Donc Nadine ce n’est même pas une question de prix, je préfère boire rarement mais bon que souvent du vin fait en cave…

      Bien cordialement

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  2. georgestruc

    merci Marc, superbe !
    Un site qui engendre à la fois l’admiration et un certain effroi…90 % de pente, soit 42° !! Quels vignerons extraordinaires. Hommage !

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    1. Bien calculé, et encore, 42° à l’ombre … , ce qui fait 37,2° le matin ou alors je n’y comprends que … Dalle, ma Béatrice.
      Je remarque que, si certains lecteurs désapprouvent l’usage des langues étrangères, car il ne les comprennent pas, aucun ne s’élève contre la trigonométrie. Je subodore toutefois qu’ils ne la comprennent guère plus.
      Si on prend le cosinus de 42 degrés, qu’on le multiplie par la racine (carrée) du courmalin et qu’on l’intègre entre + le tour de taille de NFA et – le même tour de taille, on obtient le rendement en livres par pied carré. Lumineux!

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  3. Comme j’avais peur de ne pas être clair, sauf pour l’infime minorité des lecteurs qui sont férus en math, j’ai été voir comment expliciter mon point de vue. Voici (merci WIKI): « La fonction cosinus est une fonction mathématique paire d’un angle. Dans un triangle rectangle, le cosinus d’un angle est le rapport de la longueur du côté adjacent par la longueur de l’hypoténuse. Les fonctions trigonométiques peuvent être définies de manière équivalente comme la longueur de différents segments sur le cercle unité. Les définitions plus modernes les caractérisent par des séries entières ou comme des solutions d’équations différentielles particulières, permettant leur extension à des valeurs arbitraires et aux nombres complexes. »
    Ca va mieux ainsi, non? Là-dessus, qu’est ce qu’on boit?

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      1. Avec un grand plaisir:
        « Cette bouteille était tombé’
        De la soutane d’un abbé
        Sortant de la messe ivre mort.
        Une bouteille de vin fin
        Millésimé, béni, divin,
        Je la recueillis sans remords.
        Et je repris ma route en cherchant, plein d’espoir,
        Un brave gosier sec pour m’aider à la boire.
        Car c’est une des pir’s perversions qui soient
        Que de garder du vin béni par-devers soi.
        Le premier refusa mon verre
        En me lorgnant d’un oeil sévère,
        Le deuxième m’a dit, railleur,
        De m’en aller cuver ailleurs.
        Si le troisième, sans retard,
        Au nez m’a jeté le nectar,
        Le quatrièm’, c’est plus méchant,
        Se mit en quête d’un agent.
        Car, aujourd’hui, c’est saugrenu,
        Sans être louche, on ne peut pas
        Trinquer avec des inconnus, »

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  4. Luc je voulais liker deux de vos commentaires mais comme les cinq du vin n’ont toujours rien compris à l’informatique je ne peux liker à partir de mon compte facebook…..
    Dommage, mais avec vous au moins au lit des trucs pleins de fondement exprimées de façon très drôle.

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    1. Avec moi au moins au llt … C’est vrai que quand j’étais plus jeune, ma réputation était flatteuse (quoique surfaite, si si). mais à présent, le diabète, mon traitement anti-hypertenseur, une prostate sur le déclin et surtout une compagne peu partageuse ne favorisent pas la bagatelle! Je vous décevrais.

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