Surgie des granites endémiques, la butte basaltique du Puy Saint Romain s’embellit de vignes.
Au sud-est de Montbrison, plus connue pour sa fourme, les parcelles du Pic du Puy* voit grandir ses Viognier avec sérénité. Même quiétude retrouvée au sommet de la colline, où le Prieuré semble encore habité par l’âme d’Aldebertus, premier prieur qui y pris ses quartiers en l’an 1007. Et comme ensemble monastique rime avec vignes, elle dut s’y planter assez rapidement. Un texte retrouvé dans les archives de la Diana* informe qu’au 13es, le Prieur et les habitants de Saint Romain le Puy pouvaient déguster un vin appelé « vin de nuyts », on en ignore la couleur comme le cépage.
* Pic du Puy : pléonasme involontaire dû à l’usage, puy voulant dire pic
* Diana : société historique et archéologique du Forez, fondée en 1863 par le duc Victor de Persigny, elle est l’une des plus anciennes sociétés savantes de France.
Maintenu jusqu’à l’aube du 20es, le petit vignoble disparaît presque entièrement avec la première guerre mondiale. Ce n’est qu’en 1997 que les pentes abruptes du Pic récupèrent leur couvert viticole. Quelques arpents de Viognier sont plantés, ils donnent deux cuvées, La Vigne d’Aldebertus et La Diana, tous deux en Vin de France.
La Vigne d’Aldebertus 2012 Vin de France GAEC du Pic
Issu du bas de coteau, là où le sol offre quelque profondeur, il interpelle par sa couleur jaune dorée inattendue. On pourrait le croire moelleux, voire liquoreux, il n’en est rien. La pêche de vigne et le cédrat confit pourraient prétendre le contraire, comme la purée de mangue et le sésame grillé. Mais la bouche est formelle, pas de sucre, malgré la tendre onctuosité qu’engendre le gras développé par la cuvée. Certes un peu « just » en acidité comme tout Viognier qui se respecte, l’équilibre est sauvé par la tension minérales et la délicate amertume qui nous rappelle la gentiane. Alors ? Le ton or nous est donné par la légère pointe oxydative qui lui va bien, elle augmente la complexité sans alourdir le vin qui fait sa malo et s’élève 5 mois en cuve inox.
Jim nous en déjà parlé sur son blog
http://jimsloire.blogspot.be/2012/11/more-excitement-in-roannaise-and-forez.html
La Diana 2012 Vin de France GAEC du Pic
Le doré moins prononcé, le nez minéral comme une pierre chaude mouillée par l’orage, brume évanescente qui nous apporte des senteurs d’abricot sec et d’angélique confite, puis une vapeur de chèvrefeuille où tourbillonnent quelques pistaches grillées. La bouche savoure La Diana comme une écume, espuma fruité salé au goût d’amandes grillées arrondi par une liqueur de pêche, puis viennent les notes florales de violette et de jasmin. Un vin élégant qui rappelle le Condrieu et qui confirme le bon choix du cépage qui sur ces pentes magmatiques s’épanouit avec grâce.
La cave Mondon Demeure a été créée en 1974 par deux passionnés de viticulture, Fernand et Daniel Mondon, qui mettent en place le «GAEC DU PIC». Depuis, Fernand a pris sa retraite, alors que Christiane Mondon et Laurent Demeure viennent aider Daniel. Enfin, récemment Pierre Rolle a rejoint l’équipe. Le vignoble se situe sur 7 communes autour de Boisset St Priest sur le terroir des Côtes du Forez et des Vins de Pays d’Urfé, basé sur le Pic de Saint Romain, le terroir le plus au sud des Côtes du Forez et du confidentiel vin de Pays d’Urfé. La GAEC produit 40.000 bouteilles par an.
Les Côtes du Forez ont une géologie particulières faite de granit en majorité ponctué de dômes et de necks volcaniques. Une bonne vingtaine de pour-cent du vignoble forézien pousse dans ce type de sol assez rare.
La formation
Le volcanisme y a commencé au Tertiaire, il y a quelques 62 millions d’années avec l’éruption du volcan Montaubourg. Le Massif Central, vaste plateau érodé, subit alors le contrecoup du plissement alpin qui s’accentue entre –20 et –10 millions d’années et voit s’installer un jeu de failles. Des parties du massif s’enfoncent pour donner naissance aux bassins d’effondrements appelés limagnes. D’autres restent en place comme les Monts du Forez et de la Madeleine qui séparent Petite et Grande Limagne. Grande pour la vallée de l’Allier à l’Est et au Sud de Clermont-Ferrand et Petite pour la plaine du Forez dans la vallée de la Loire de Montbrison à Roanne.
Le long des failles, le volcanisme donne naissance à la chaîne des Puys dont le Forez et sa trentaine de volcans occupe le flanc Est. Le sol basaltique offre une série d’éléments propices à la vigne comme le fer, le magnésium, le manganèse. Un terroir qui donne des vins plus structurés, plus tanniques et plus acides.
Ciao!
Marc
Les 5 du Vin 
Riche idée, Marc, que de nous faire découvrir ce vignoble, avec en prime, sa géologie!
Tu nous ramène deux trois bouteilles?
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Font pas du Gamay dans ce volcan ?
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En AOC/AOP Côtes du Forez (qui n’accepte que le rouge et le rosé), le gamay est même le seul cépage autorisé.
Les blancs doivent se contenter d’un IGP ou de Vin de France,
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On devrait dire les gamay sont autorises, car en plus du gamay noir a jus blanc habituel, on touve du Gamay-St-Romain, et d’autres gamay dont je ne me souviens pas. Voir le dernier numero du Le Rouge & Le Blanc pour un tres bon et complet reportage sur Cotes Roannaise et Cote du Forez.
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C’est juste, Denis, le décret ne fait pas le détail. Je cite:
« 1° Encépagement :
Les vins rouges et rosés sont issus du seul cépage gamay N.
2° Règles de proportion à l’exploitation :
Pas de disposition particulière. »
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Marc, tu as raison de relever cette double insistance « Pic du Puy », venant du latin « podium ». On retrouve la même chose dans d’autres parlers : en occitan (voir Puech-Haut par exemple) mais aussi en catalan. Ainsi, le Puigmal (2910 m, presque notre point culminant, plus élevé que le Canigou mais un peu moins que le Carlit avec ses 2921 m, nos 3 « presque 3.000 m ») signifie-t-il Pic de la Montagne (« mal », racine prélatine).
PS: webmaster Padresanctus revient à la charge !
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Peut-être il y a-t-il comme une crainte que des locuteurs non avertis confondent puy et puits.
Ce qui me fait me demander tout à trac, Luc, es-tu un puy ou un puits de science?
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C’est la vérité qui empoisonne l’eau du puits (vieille sagesse arabe). Demande à Truc, tu sais, l’homme qui aime ce qui est simple, le grand copain de Michel Smith (avec Bettane).
La science, je la vénère mais n’en possède qu’une partie infime. M’en fous d’ailleurs ; avec Proudhon, je pense que « La propriété, c’est le vol », mais touche pas à mes vignes quand même !
Les puits que j’aime, ce sont l’Auberge du Vieux Puits *** et aussi le Puits Saint Jacques **, car on y trouve mes petits bébés.
Et à propos d’auberge, il faut s’attabler au ryokan de Masachi Ljichi à Valence : la Cachette*. Délicieux. C’est un ancien de chez Pic et des frères Pourcel. Dis à MVH que, quand Courbis – qui figure à la carte – ne l’invite pas en hélicoptère chez Pic, c’est une bonne adresse.
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Tout à fait juste : le terme « podium » latin, qui désigne une relief, une colline, après des transformations habituelles en la matière, est devenu, dans le Centre et le Midi de la France, Puy, Pech, Puech, Puig, Puey, Pueys et quelques autres formes mineures. Dans mon village vauclusien, J’habite « quartier du Pueys », au pied d’une petite colline. Certains sont devenus des patronymes occitans, languedociens et catalans, comme Puech (célèbre antiquaire avignonnais) et Puig.
Souvent, on trouve le radical « car » associé à des reliefs ; il s’agit d’une racine pré-indo-européenne, que l’on identifie aujourd’hui encore en Arménie, qui signifie « pierre », « rocher » ou même par extension « relief rocheux ». En Vaucluse, le village de Caromb comportait des carrières d’une pierre calcaire très appréciée qui a servi à une partie de la construction du palais des Papes.
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J’aime beaucoup le petit coin entre Malaucène, Caromb et Bédouin. Je m’y promenais souvent quand j’habitais Jonquières. Le Ventoux semble différent vu de ce côté. Vous avez bien de la chance de vivre près de là, Georges! Il y a des problèmes partout, bien sûr, mais un beau paysage, un bon climat, c’est appréciable. Bonne journée de ma morne plaine sous la pluie.
Hervé
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Bel article, Marc, sur des vignobles peu connus. Et bravo pour tes connaissances géologiques exposées en une synthèse très pédagogique. Le Puy de Saint-Romain est effectivement un neck basaltique implanté sur une fracture qui a favorisé l’émission de laves au cours du Tertiaire. Les basaltes et leurs éboulis à éléments anguleux, sur lesquels les vignes sont installées, sont des roches foncées très riches en minéraux ferro-magnésiens. Peu de silice, en revanche, contrairement aux granites des Côtes du Forez ou de la vallée du Rhône septentrionale. Je trouve , pour ma part, que les blancs élaborés à partir des viogniers de Saint-Romain sont un peu plus tendus, « anguleux », que leurs cousins viogniers de Condrieu.
Vers la partie basse de ce vignoble, la fraction détritique plus calcaire, d’âge tertiaire (Oligocène, marnes et sables fins), favoriserait, me semble-t-il, la présence du gras et de l’onctuosité.
Encore merci, Marc, d’avoir mis en avant ces vignobles confidentiels.
Et bon week-end. En attendant une prochaine rencontre.
Georges
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