Que boire avec des petits pois à la Catalane ?

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La saison des petits pois tire à  sa fin, elle est courte: de mars à juin!

J’ai voulu en profiter une dernière fois cette fin de semaine, et comme d’habitude j’ai hésité sur le choix du vin qui allait les  accompagner.

Je ne sais pas si vous avez déjà gouté des petits pois du Maresme, ou «caviar du Maresme», comme on l’appelle ici, ils valent vraiment le détour. Il ne faut pas se fier à leur taille, ils sont gros c’est vrai, mais cuisinés juste fraichement cueillis ils sont tout simplement divins. Verts et croquants, les petit pois ont un goût légèrement sucré. Et pourtant, on ne les mange quasiment que dans des préparations salées.

Je vais vous donner ma recette (très facile) que je tiens de ma grand-mère qui était catalane.

Ingrédients pour 2 personnes:

1,2kg de petits pois

4 ails tendres

3 oignons nouveaux

1 boudin noir

Huile d’olive vierge

Sel, poivre, une feuille de laurier

Une cuillère à café de sucre

Menthe fraiche

1 petit verre de rancio ou si vous n’en avez pas, un verre de vin blanc

200 grammes de jambon ibérique taillé en morceaux

Fond de veau ou de volaille

 oignons nouveaux

Dans une casserole faites revenir les oignons, l’ail tendre taillé en lamelles, et les dés de jambon ibérique avec un peu d’huile d’olive. Quand tout est doré, ajouter le verre de rancio ou de blanc, laisser évaporer l’alcool. C’est le moment d’y ajouter les petits pois et le boudin noir ainsi qu’un peu de fond de volaille ou veau. Sel, poivre, sucre et laurier. Laisser cuire 10/15 minutes et  couvrir  pour qu’ils terminent de cuire seuls. Quelques minutes avant la fin de la cuisson, rajouter les feuilles de menthe sur le dessus. C’est prêt !

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Que boire avec ? Ici, dans le Penedès, on aime bien les accompagner avec un cava rosé. Mais j’avais envie de changement !En regardant dans ma cave, j’ai repéré 4 vins, qui attendaient ma dégustation, et comme c’était dimanche, nous avons décidé de les tester tous les quatre, un brin de folie de temps à autre ne peut pas faire de mal.

Deux blancs, un rosé et un rouge.

Le premier blanc était un Châteauneuf du Pape Domaine des Sénéchaux 2010,  constitué de 33% de roussanne, 29,5% de grenache blanc et 8% de Bourboulenc. La couleur  était légèrement évoluée, le nez offrait des notes de poires, pommes légèrement oxydées, mais pas désagréables. En bouche un corps moyen, associé à une acidité moyenne et à une bonne « crémosité », ont rendu acceptable le mariage avec les petits pois. Le vin a résisté, le coté végétal n’a pas été amplifié et la légère oxydation a bien accompagné le jambon. Mariage de raison, mais pas totalement satisfaisant, j’attendais mieux de ce Châteauneuf.

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Nous sommes donc passés aux autres vins, du Roussillon cette fois-ci et plus précisément des Aspres : ceux de Julien Ditté et Olivier Cazenave, dont le joli nom AMISTAT, est déjà tout un programme. Des vins que je suis depuis leur premier millésime puisque je connais bien julien, nous avons eu le même employeur dans les années 91, Robert Pairot, bouchonnier, mais aussi propriétaire des Feuillants. Après un passage dans le Bordelais, où nous nous sommes retrouvés au même moment, j’ai suivi ses pas à son retour en Terre catalane. Les deux amis louent 4 parcelles, exclusivement des vieilles vignes, plantées entre 1947 et 1955, disséminées sur la commune de Tresserre. Choisir le Terroir des Aspres, en dit long sur le caractère de Julien, ici les vignes connaissent la tramontane et la marinade, elles ne sont pas très recherchées, mais pour qui c’est le comprendre, c’est un Terroir authentique, si catalan, et si prenant. Moi aussi, je crois à ce terroir , je l’aime, et je ne suis pas étonnée par les vins qu’il a su en tirer, proches de la nature,  différents et sincères! On ne peut pas dire qu’ils suivent le courant des vins naturels, mais c’est vrai que julien utilise le minimum de soufre nécessaire, pour garder aux vins le maximum d’authenticité et de pureté.

Nous avons commencé par le Tatsima 2015 Vin de France

Un 80 % grenache gris, 20 % grenache blanc cueillis à la main à parfaite maturité sans élevage sous bois. J’avoue que j’ai commencé par aimer l’étiquette et ensuite la couleur rose orangé.  Si c’est un rosé, je n’en suis pas certaine, rien sur l’étiquette ne le confirme, mais c’est comme ça que je le perçois, il est taillé pour la garde. Le nez est franc et complexe, il évolue vers des notes moelleuses de fruits à noyaux et d’amandes, tandis que la bouche ample révèle une grande puissance aromatique, mais enveloppée d’une très grande  texture ronde et gourmande. Il s’est comporté merveilleusement bien avec les petits pois, d’abord sa couleur, elle rappelait celle de certains morceaux de jambons translucides, sa puissance lui permettait de résister à ce plat quand même fort en gout, n’oublions pas l’ail, l’oignon… et bizarrement sa fraicheur sublimait la menthe et une note légère de rancio que je n’avais pas relevé lors du premier verre, arrivait en finale pour enlever le plat.

Un grand rosé authentique, pas dans la modernité, ni dans la tradition, un rosé avec un caractère trempé aussi puissant et viril que notre Tramontane : il décoiffe « grave » comme diraient les jeunes.

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Du coup je n’avais plus envie d’ouvrir les deux autres bouteilles, devant l’insistance de mon compagnon, j’ai cédé.

Prix public TTC : 20 à 25 euros

J’ai donc débouché l’Amistat Blanc 2014, c’est un Vin de France 40 % grenache gris, 30 % macabeu, 20 % grenache blanc cueillis à la main à parfaite maturité.  Comme pour le rosé, Vignes plantées vendanges manuelles issues de vignes plantées entre 1950 et 1960.

Léger débourbage. Sulfitage : 2 à 4 g/hl. Fermentation alcoolique et malolactique en demi-muids de chêne français, élevage : 12 mois dans ces mêmes demi-muids avec bâtonnage des lies. Soutirage direct et mise en bouteilles par gravité.

Sa couleur est jaune paille, avec des reflets légèrement dorés, d’une belle intensité. Le nez est puissant, il offre de nombreux arômes, il y a de la pomme mûre type golden, des notes d’herbes fraiches, de fenouil, d’anis, de fruits à noyaux, comme la pêche et l’abricot. La bouche est une belle surprise, elle est dense, mais pas pesante, sa fraicheur, sa rondeur surprennent. Un vin gourmand et harmonieux.  Mais le mariage avec les petits pois ne nous a pas convaincu, aussi nous l’avons écarté.

Gouté le lendemain il nous a régalé, et son élégance méditerranéenne n’en est ressorti que davantage. Je n’avais pas vraiment perçu la longueur de sa finale aromatique et épicée. Très beau vin !

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Prix public TTC : 20 à 25 euros

Restait l’Amistat grenache Rouge 2011, son premier millésime qui était lui en Côtes Du Roussillon. Je me rappelle quand Julien m’a offert cette bouteille il m’a fièrement annoncé : «Ça y est, on l’a fait, le vin qui nous plaît».

La couleur prune est encore assez profonde,  propre et transparente. Nous partageons les sensations intenses du nez : les arômes sont puissants,  nous sentons les fruits mûrs mais pas confiturés, ni les raisins secs, le vin est dominé par des notes de fruits noirs confits, cerise à l’eau de vie, mêlées à celles épicées de cannelle, semblables à celles des meilleurs vins doux de Banyuls. Gouté avec les petits pois, il  nous séduit encore davantage, son côté sauvage, singulier, joue avec le boudin et les touches balsamiques, de romarin et d’herbes fraiches que nous y trouvons accompagnent la menthe et les petits pois. Comme le vin est puissant, (il vaut d’ailleurs mieux le boire un peu frais), et que le plat est gouteux, l’accord est divin. Le côté moelleux du plat associé au moelleux du vin remplissent la bouche de sensations fortes, gourmandes et complexes. Un vrai régal !

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Prix public TTC : 20 à 25 euros.

Conclusion : Une belle expérience, je ne regrette pas d’avoir ouvert 4 bouteilles. Elles ont d’ailleurs tenu le choc jusqu’à mercredi.

Vive les Aspres !

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Hasta Pronto,

 

Marie-Louise Banyols

 

11 réflexions sur “Que boire avec des petits pois à la Catalane ?

  1. Puzenat Norbert

    Si la récolte des petits pois en Catalogne se termine, ce n’est pas le cas dans le Nord. On se demande même si elle commencera un jour, avec les pieds dans l’eau. Et pour nous, les petits pois seront plutôt ceux du Marasme. Merci pour ce plat Catalan qui nous apporte un peu de soleil. Petite coquille relevée: le sulfitage de l’Amistat blanc est de 2 à 4 g/hL et non par L.
    Cordialement.

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  2. Je suis dans les infos toutes ces perturbations et je compatis.
    Merci pour avoir relevé ma coquille, on a beau relire, on laisse toujours passer quelque chose.
    Cordialement,
    Marie-Louise Banyols

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    1. Coquille ? Il nous manque plus qu’à tester les escargots à la catalane… Et avec quoi ?
      Merci au passage de souligner l’esprit nouveau qui souffle sur les vins des Aspres… Le grenache de Julien est non seulement inimitable, mais irréprochable et je le savoure à grandes lampées !

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  3. georgestruc

    Heureuse coïncidence : nous avons dégusté un Amistat 2011 grenache rouge il y a 15 jours, servi à 16-17°, pour accompagner une canette cuite juste rosée. Ce fut un plaisir intense ! Quel beau vin, une fraîcheur et une longueur extraordinaires ; des tannins bien fondus ; une matière charnue, des fruits noirs parfaitement mûrs ; concentration, certes, mais bel équilibre. Accord plus qu’appréciable avec ce délicat volatile. Une valeur sure. Merci, Marie-Louise, de mettre dans la lumière les vins de Julien.

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  4. Je partage : cette bouteille ce fut un plaisir intense, mais le 2013 n’est pas mal non plus, en Vin de France cette fois-ci.
    Il faudrait trouver le temps de partager nos gouts communs autor d’une table! Voeu pieux!

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  5. Michel JEAN

    Je sais que je vais encore surprendre un peu mais les pois gourmands cuisinés avec un peu de sucre et de la menthe fraîche apporteront une note incomparable de fragilité au vin blanc.

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  6. Non, ça ne devrait pas, si le vin a suffisamment de puissance, et puis, le sucre , c’est juste une cuillerée à café. Il ne faut pas oubler, que les autres éléments du plat, jambon ibérique et boudin ont leur mot à dire. Mais ç’est évidemment que ça n’est pas le meilleur mariage, d’ailleurs nous les avons écartés.

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  7. Cela fait douze millésimes que je baigne mes papilles, avec délice, dans une terre où TOUT est « à la catalane »: il y a un car-wash « catalan », un « centre d’imagerie » catalan, un centre d’oncologie « catalan ». J’avoue, cela ne va pas me faire des amis en plus, que cela commence à me gonfler dans la grande longueur. Voilà pour la grogne. Pour le reste, ces petits pois sont un régal, surtout quand ce sont les femmes qui les écossent: leurs doigts agiles et rapides sont une caresse pour l’oeil et confèrent une qualité gustative supérieure à ce légumineux. En effet, même si un canard s’appelle « Le Travailleur Catalan » et qu’il aura bientôt sa fête (comme l’Huma), on voit quand même pas mal de keums aux terresses des cafés (c’est le sud) et se sont les TRAVAILLEUSES catalanes qui impressionnent! Avez-vous déjà essayé les petits pois crus et froids, rien qu’avec un peu de fleur de sel? C’est délicieux. En plus, on apporte sa contribution à l’effet de serre.

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