Bon, je vais vous épargner le détail sur la rengaine qui, dans les années 70, voulait qu’il neigeât un jour sur le Lac Majeur… « et le pauvre vin italien s’est habillé de paille pour rien… ». Amateurs de vieilleries, allez voir par ici. Honnêtement, avec le recul, il me semble que les paroles d’Étienne Roda-Gil pour Mort Shuman sont plus intéressantes que la ritournelle de ce dernier. Bref, si j’essaie de vous épargner tout cela, c’est parce que je suis en vacances et qu’il fait chaud. Lourd même.
Ce qui explique mon drôle de titre : Devoirs de vacances sur le Lac… à condition que mon traducteur ne m’ait pas trahi. Et en insistant sur l’aspect frizzante de ces devoirs très particuliers. Marc, toi qui pratiques l’italien mieux que moi, je compte sur toi pour me rassurer. Quant à vous, cher Lecteur, j’espère que vous me suivez !
Tantôt ambiance tropicale sans la musique ni les fruits qui vont avec, tantôt en phase fins de journées sublimes avec vues ennuagées à perte de montagnes, tantôt matinées éclatantes de soleil. Car sans compter les collines et les hauts sommets alpins qui se dessinent face à moi derrière la ville de Vernabia, je peux par moments discerner 5 à 6 monts culminant entre 3.000 et 4.000 mètres et plus. Ce panorama assez unique s’offre à mes yeux en permanence, avec de temps à autre une surprise de taille, le fameux Mont Rose qui tutoie le Mont Blanc avec ses plus de 4.600 mètres d’altitude. Si je vivais ici en permanence, pourrais-je me lasser un jour d’un tel spectacle ?
Comme moi vous comptez probablement parmi les fanas de l’Italie. Dans ce cas, vous avez reconnu et probablement envié ma position : à 500 mètres d’altitude environ, au-dessus de Laveno-Mombello, bourgade d’opérette jadis connue pour ses céramiques. En d’autres termes, je loge provisoirement sur les rives lombardes du Lago Maggiore, à 20 ou 30 km de la frontière Suisse, face au Piémont. De ce magistral balcon, prêté par mon amie Nadia Lingero et son mari Alberto Piccoli, j’ai parfois l’étrange sensation de dominer le monde et d’avoir à mes pieds une mer rendue, grâce au vent, légèrement frizzante.
Aussi, pour retomber les pieds sur terre, me suis-je livré à un petit exercice tout simple qui consiste à me rendre chez le meilleur caviste du coin – Bruno Bottazzi qui dirige L’Enoteca de Besozzo en plus de parler admirablement le français – avec comme idée de me construire une mini dégustation sur le thème imposé «Lambrusco & cie». Advienne que pourra, je lui ai dit en substance «faites moi un bon choix de 6 bouteilles bien en dessous de 10 € en laissant tomber Franciacorta», appellation de style trop champenois déjà largement abordée dès les premiers pas de ce blog commun. Sitôt dit, sitôt fait je repartais avec mes devoirs dans un carton, de quoi me farcir quelques apéros dans les grands verres genre Riedel prêtés par Nadia & Alberto.
Ne comptez pas sur moi pour détailler la législation italienne en matière de bulles frizzante ou pas, qu’elles soient directement inspirées de la « méthode champenoise » ou de la « cuve close » style Charmat. Je suis en vacances, en conséquence prière de ne pas déranger mon cerveau. Cela dit, à propos de bulles ritales, je vous conseille chaudement le très documenté blog Mille Bolle de notre confrère Franco Ziliani. Bon, c’est en langue de Dante et il y présente souvent de nombreux vins français, mais le gars a des dossiers très précis sur toutes les appellations italiennes.
Retournons à l’objet de ma chronique. Voici les vins que j’ai aimés.
-Il ne plaît pas à tout le monde ce Lambrusco (IGT Emilia) « La Luna » de chez Ceci. Serait-ce à cause de la ficelle de chanvre qui retient le bouchon ? Et pourtant j’adore son grenat sombre et profond rehaussé d’un disque argenté, son croquant, son allure légère (11°) et quelque peu cavalière qui fait songer aux premières burlats d’un généreux mois de Mai à Céret, dans « mon » Roussillon. Oui, on a envie de cerise tant ce vin évoque un clafouti. C’est charnu, vif, frais et acidulé à souhait, parfait pour l’apéro. Pas cher : autour de 5 €. Mon préféré, et le prix n’a rien à voir dans ce choix car quand il s’agit de vin, je suis loin d’être pingre…
-Également de Ceci, toujours Lambrusco, cette cuvée un peu plus bling bling « Terre Verdiane » étonne d’abord par sa bouteille d’une forme que l’on pourrait qualifier de conique. Un rouge également soutenu qui a gardé beaucoup d’acidité mais présente plus de longueur que le précédant. Si le premier était un vin destiné au clafouti, celui-ci aurait un rôle important à jouer dans et avec une soupe de fruits rouges. Son prix : 6,25 €.
–Valdobbiadene (DOCG) Prosecco Superiore est l’appellation réservée à cette zone du secteur de Trévise, à une heure de Venise, où les trois pinots (blanc, gris et noirs) sont implantés en même temps que le chardonnay. Le vin n’est plus rouge, mais blanc. Discrètement millésimé 2012, il n’est plus frizzante, mais spumante. Voilà ce qui explique en partie que cette cuvée «Brunei» du Domaine La Tordera, qualifiée de brut et titrant 11°5, ait de faux airs de champagne : bulles fines, mousse persistante, souplesse en attaque, le vin a des notes d’amande grillée et de graines de courges torréfiées. Il est agréable, sans plus, me paraissant un peu trop gras et légèrement sucré. Tiens, il irait bien sur un poisson du lac, une perche ou une truite cuite en meunière ! Il m’a coûté 7,50 €.
-De la même DOCG, ce « Mas de Fer » de la maison Andreola est un extra dry commercialisé à 8,30 € Lui aussi millésimé 2012 dans la plus parfaite discrétion – faut chercher sur la contre-étiquette -, mousse persistante notes d’angélique et de pomme verte, mais une finale sucrée qui se dissocie du corps du vin avec de faux airs de citronnade. Je n’aime pas trop, mais ça se boit… pourquoi pas en long drink comme les nombreux spritz que j’ai pu avaler au bord du lac. Je crois que ça vient d’Autriche – la Lombardie était autrichienne, jadis – et la recette est simple : une bonne dose d’Aperol noyée dans une autre large rasade de Prosecco et un peu d’eau gazeuse pour finir. Servir avec une paille, beaucoup de glaçons et une demie tranche d’orange de Sicile, si possible, sinon d »ailleurs.
À la bonne vôtre !
Michel Smith
Et bien mon cher Michel, je constate que les vacances ne t’empêchent pas de travailler, mais Dante n’écrivait-il pas « il lago ispirarmi’ dans sa fameuse trilogie « Mai la mattina ». Profite des reflets du lac…
Marc
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Michel, j’envie tes vacances dans ce lieu superbe et je ne voudrais pas les gâcher en pinaillant, mais depuis quand un Prosecco DOCG ne contient-il pas une forte majorité (je crois que c’est 85%) du cépage local gléra, parfois appelé prosecco d’ailleurs ?
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Tout à fait raison David, Michel va devoir corriger ses « compiti ».
Je vous laisse lire avec intérêt le nouveau décret, ou « Disciplinare » du Prosecco (qui était le nom du cépage jusqu’il y a peu et est aujourd’hui appelé Glera, comme tu le signales),
« Come tradizione, il vino viene prodotto con un minimo de 85% di uve del vitigno Glera e, per un massimo del 15%, di uve Verdiso, Bianchetta, Perera, Glera lunga varietà presenti da secoli nelle colline di Conegliano-Valdobbiadene. Per lo spumante, si possono utilizzare anche le uve Pinots e Chardonnay ». Pinot est au pluriel, c à d que sont permis les 3 Pinot blanc, gris et noir. Bises les chéris!
Marc
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Je savais que je pouvais compter sur vous les copains… Mais ne serait-ce pas un peu comme chez nous, où le Carignan est limité à des proportions infimes par décret mais se retrouve dans la cuvée en proportion nettement majoritaire. Pas grave de toutes façons car l’essentiel était de faire semblant de travailler. Ciao !
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Il Dottore Fabbro voit juste en grand sage qu’il est. Peut importe la règle, pourvu qu’on ait de l’ivresse, ce qui n’est guère viniquement correcte de nos jours de puritanisme gallopante.
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Michel, tu es toujours en vacances mon ami. Mais je te trouve bien sévère avec Mort Shuman (qui s’orthographie sans « c » après le S initial) qui a donné à la variété française des choses bien meilleures que la moyenne en vigueur et qui serait venu en France, dit-on, par amour du bon vin. Tes photos me font aussi penser à « Quantum of Solace » – oui Léon aime bien les James Bond movies ! Bois sec et prends du plaisir. Nous ce soir, ce sera un Riesling Spätlese trocken du vignoble Hahn à Bacharach (tu sais, la vallée de la Lorelei de Heinrich Heine), année 2011, mais déjà d’une finesse et d’une définition parfaites. Ce millésime a produit des vins immenses en Moselle, Rhénanie et Palatinat. Et l’exemplaire en question atteint 13,5 vol % sans chaptalisation … bien plus mûr donc que le niveau revendiqué de son Prädikat. Christine l’a préféré au 2012, plus simple mais aussi plus « riesling », un rien plus variétal. Et ce que femme veut …. Et Drehverschluß bien sûr.
Petit lien pour toi : http://coumemajou.jimdo.com/2013/06/27/son-vin-a-bon-goût-sur-nos-lèvres/
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Tu as raison Léon pour Shuman : j’ai bêtement recopié l’orthographe de You Tube. Ah, les dangers du Net ! Deux fautes graves en un post et une semaine de vacances ! Je sais que Mort aimait le vin, mais il me semble qu’il était très Bordeaux. Pas grave. Et merci pour le lien…
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Tu dis pas Graves, Médoc alors, mon forgeron d’amour ?
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