Escapade à Ténérife (3): la volcanique vallée de l’Orotava (Nord)

L’influence des volcans dans le vignoble est fascinante et nous offre des vins uniques, inimitables, enrichis d’une salinité inhabituelle qui, au fil du temps, évoluent vers une minéralité marquée. Une minéralité directe , une nervosité  impétueuse, de la fraîcheur, de la verticalité, tant dans les vins blancs, d’une grande élégance, que dans les vins rouges, austères et pointus. Herbes aromatiques, soufre, sels, silex … Plus qu’une éruption, une explosion de sensations: ils sont d’une beauté héroïque !

En allant vers l’ouest, la Vallée de l’Orotava illustre le climat du nord de Tenerife avec beaucoup d’humidité et de vent, mais à des altitudes plus élevées un peu plus loin de la mer. Autrefois, c’était la terre de la Malvasia, berceau des vins doux si populaires en Amérique et en Grande-Bretagne. Aujourd’hui, on lui préfère le Listán Negro (La Habanera, San Antonio) et de Listán Blanco (Palo Blanco). Les vignobles s’étendent à une hauteur située entre 400 et 800 mètres et composent un joli paysage avec les bananeraies de la côte et le Teide en arrière-plan.

La D.O Valle de la Orotava est née en 1995. La superficie du vignoble est de 650 hectares sur lesquels on compte une quinzaine de bodegas qui recueillent les raisins d’environ 600 petits producteurs. Elle doit son nom à la vallée du rift sur laquelle elle se situe, dont les pentes s’élèvent jusqu’à 800 mètres d’altitude. Là, sur des sols volcaniques, le climat atlantique envahit le paysage, influencé par les alizés. La méthode de culture y est différente, les vignes sont traditionnellement formées selon la méthode Cordon Trenzado (cordon tressé) unique aux Canaries.  Il s’agit de tresser habilement les vignes pour les garder hors du sol, les protégeant de la moisissure dans ce climat humide. C’est une tresse travaillée faite avec les sarments, de façon traditionnelle  le pied de vigne est taillé de façon à pouvoir s’étaler sur plusieurs mètres, voire plusieurs dizaines de mètres palissés, où les vignes sont tressées ensemble, ce système de conduite est très ancien et permet de mener deux cultures en même temps sur la parcelle, les pommes de terre, ici la fameuse « papa » et la vigne. Dans ces longues tresses, qui peuvent dépasser une dizaine de mètres de longueur, est mélangé du bois de plusieurs années, qui est noué avec des fibres naturelles ou artificielles et maintenu à une cinquantaine de centimètres de haut grâce à des fourches qui s’enfoncent dans le sol et ils sont situés à égale distance, environ un mètre chacun. Les cordons peuvent être simples -un seul cordon par souche-, ou doubles, qui peuvent être disposés en forme de «v» ou avec les deux bras positionnés dans des directions opposées. L’orientation dépend de plusieurs facteurs, mais généralement et tant que le terrain le permet, les bordures sont orientées du nord au sud. Le tronc au nord, vers l’océan Atlantique, et la pointe au sud, en montée, regardant le sommet du Teide.

Dans les doubles lacets aux bras tournés dans des directions opposées, une extrémité est orientée vers le sud et l’autre vers le nord. Curieusement, les vignerons de la région savent que les bras qui regardent le Teide -au sud- produisent plus de raisins que ceux qui regardent l’océan -au nord. Concernant le cadre de plantation, il n’y a pas de mesures standardisées mais, en généralisant encore une fois, on peut dire que la distance moyenne entre les rangs est d’environ un mètre et celle des couloirs entre un et trois mètres. Concernant la longueur des cordons, celle-ci est plus importante pour les cépages blancs – sept mètres en moyenne – que pour les  rouges – cinq mètres et demi. L’une des caractéristiques les plus improbables du cordon tressé est qu’il est possible de déplacer les bras du site pour effectuer l’entretien du sol ou pour planter une culture associée à la vigne. Imaginez ce que cela doit être de bouger un bras de dix mètres de long et de le déplacer!!!

Au total, une vingtaine de cépages différents sont cultivés; parmi les blancs, le listán blanco est le plus courant; mais il y a aussi l’albillo criolo, la bermejuela blanca, la doradilla, le gual, etc ; et parmi les rouges, la castellana noire, le listán negro, le negromoll, la tintilla, le vijariego ou le baboso… Toutes ces variétés, souvent assemblées, permettent d’obtenir des vins singuliers, avec souvent des notes fumées rappelant les cendres volcaniques.

Aujourd’hui, je vous parlerai de trois bodegas qui me tiennent à cœur :

Envinate

Dans la vallée de l’Orotava, l’équipe dont je vous ai déjà parlé (voir le volet 2 de cette escapade) travaille trois vignobles centenaires pour produire trois vins: Migan, La Habanera et Palo Blanco.

– Envinate  Palo Blanco 2019

Palo Blanco provient d’un vignoble centenaire du même nom ; il est principalement issu de Listán Blanco planté sur de riches sols volcaniques noirs à environ 600 m d’altitude. Cette zone est humide malgré l’élévation substantielle et les vignes sont conduites en Cordon Trenzado pour favoriser la circulation de l’air. Tous les raisins sont récoltés à la main et fermentent avec des levures indigènes dans du béton et sans contrôle de température avant de vieillir dans un mélange de foudre et de fûts usagés pendant 10 mois. Mise en bouteille sans collage ni filtration, et avec seulement une touche de soufre. Un vin direct, savoureux, minéral, plein de fraîcheur grâce à une acidité citrique, avec des arômes de pomme verte, de poire et des notes florales auxquels viennent s’ajouter des notes volcaniques très complexes, avec une touche très fraiche de zeste de citron. En bouche on ressent son caractère atlantique, avec des notes de pierre humide. Il est ample, tranchant, avec une remarquable minéralité et une touche saline très intéressante : un vin qui ne laisse pas indifférent, on y ressent  l’énergie et  la dimension palpitante du volcan qui éclate littéralement dans le verre en combinaison avec une faible teneur en alcool incroyablement rafraîchissante.

Envinate 2019 Tenerife Migan Tinto 

100% Listán Negro, issu de deux vignobles en cordon tressé provenant de parcelles près de La Perdoma, une ville que les colons autochtones – les Guanches – appelaient « Migan » . Il s’agit de vieilles vignes (80-100 ans)  plantées sur des sols volcaniques avec des quantités importantes d’argile, de sable et de basalte. Migan 2019 est le quatrième millésime à être réalisé; en 2017, une nouvelle parcelle appelée « Tío Luis » de près de 1 ha a été ajoutée, en plus des 0,8 ha de San Antonio et des 1, 4 Ha. La Habanera de l’origine. Environ 60% de Migan vient de La Habanera et le reste de San Antonio et de Tío Luis. La Habanera est un vignoble spécial, des vignes de 90 ans avec des sols sableux basaltiques. San Antonio et Tío Luis ont aussi des vignes centenaires, à une altitude plus basse et avec des sols volcaniques avec 30 à 50 centimètres d’argile. Les trois parcelles fermentent avec des levures autochtones et vieillissent séparément, dans des cuves en béton de 6300 L. La Habanera fermente avec 100% de la rafle, Tío Luis avec la moitié des grappes entières et San Antonio avec seulement 15% des grappes. Les malolactiques se font en fûts de chêne de 228 et 600 l., où le vin a été élevé pendant 12 mois. La mise en bouteille se fait sans collage ni filtrage, et avec juste une touche de soufre. 25,95 €

Le Migan 2019 nous offre au départ quelques notes réductrices typiques des vins issus des sols volcaniques avec ces notes de phosphore qui disparaissent progressivement à l’aération. C’est un vin avec une très bonne complexité  dégageant beaucoup d’arômes de fruits rouges, des notes épicées et de roses séchées. En bouche, il est léger, subtil, élégant et profond, avec des tanins fins, un long arrière-goût et une acidité rafraichissante. Fruité et minéralité le caractérisent. Production: 7 500 bouteilles. 12% Alc.

Bodega SoagraNorte – Suertes del Marqués

Francisco Javier García Núñez et ses fils Jonatan et Francisco ont fondé Suertes del Marqués situé au cœur de l’appellation Vallée de la Orotava en 2006. Le nom de la bodega raconte en partie ses origines : autrefois, les parcelles de la région étaient appelées «suertes». Elle domine un vignoble de 11 hectares situé au milieu de La Orotava (Las Suertes) qui s’étend en altitude entre 350 et 700 mètres  sur les pentes volcaniques du nord de l’île, et qui est composé de vignes plus que centenaires plantées en cordon tressé.

La majeure partie du vignoble est dominée par des souches centenaires de Listán noir et blanc, dans le reste, il y a des vignes jeunes et vieilles plantées de variétés indigènes (Castellana, Tintilla, Baboso negro). Ici, l’achat d’un terrain prend du temps et coûte cher : Les difficultés n’étaient pas seulement de s’entendre avec les propriétaires quand il y a beaucoup d’héritiers, c’est que le prix des terres avec des vignobles est beaucoup plus élevé que d’autres régions viticoles bien connues en Espagne. En 2008, l’œnologue Roberto Santana (du groupe Envinate), qui travaillait auparavant pour le domaine Casa Castillo, à Jumilla, est arrivé au domaine en tant que conseiller et il l’a alors reconverti en une viticulture naturelle, sans herbicides ni traitements systémiques – tant qu’ils ne sont pas indispensables pour éviter la mort des vignes. Dans toutes les parcelles on observe une couverture végétale permanente – un excellent outil pour équilibrer la vigueur des vignes avec leur rendement et améliorer la qualité de la production – qui est périodiquement défrichée.

Après le départ de Roberto Santana en mai 2016, la bodega a vécu des changements dans l’équipe technique. Jonatan García Lima en est le chef de la cave, en charge de la gestion quotidienne du vignoble et des vins. Le succès de cette bodega commence par le vignoble, bien que non certifiés bio -parce que le domaine reçoit des raisins d’autres vignerons, le travail de la vigne est réalisé manuellement dans le respect et la tradition afin d’obtenir une vendange propre et saine. Dans la cave, ils interfèrent le moins possible dans le processus de vinification, utilisent des cuves de béton ouverts non revêtus et des fûts de chêne français pour la fermentation et le vieillissement. « Nous fermentons dans des cuves en béton, où la conservation est beaucoup plus homogène et il est possible de réaliser un meilleur contrôle et une plus grande conservation des arômes fruités et minéraux ».  Le listan noir et blanc sont les variétés prédominantes, bien que l’on trouve également le vijariego negro, le baboso negro, la tintilla, l’ albillo criollo, la malvasía rose ou le Pedro Ximénez.  Depuis 2008, ils se consacrent aux «Vins parcellaires». La propriété est composée de 25 parcelles, chacune d’elle est vinifiée séparément pour donner une personnalité unique à chacune des cuvées. Jonatan García explique : «A la différence des autres producteurs qui mélangent des raisins de différentes zones, nous identifions les parcelles du domaine en fonction de leur orientation, du type de sol ou de l’altitude, et à partir de là, nous extrayons des vins spécifiques de parcelles que nous appelons La Solana, Candio, El Ciruelo, Los Pasitos, El Esquilón, etc… Et puis nous avons un vin de base appelé Siete Fuentes en rouge et Trenzado en blanc, provenant de parcelles différentes, toujours vendangées et vinifiées séparément, mais elles sont assemblées avant la mise en bouteille. Comme le vignoble n’a pas les mêmes caractéristiques à chaque endroit, nous devons travailler les vins de différentes manières, certains avec des rafles, d’autres sans;  certains sont vieillis en fûts et d’autres en cuves en béton, car ils n’acceptent pas autant l’impact du bois; certains ont des macérations plus courtes que d’autres». De cette manière, ils transfèrent la personnalité des terroirs à chacun de leurs vins.-

La bodega classe ses vins en trois gammes:

-les Villa Wines, qui proviennent de différentes parcelles de vignerons et d’autres de la propriété, vinifiés séparément et assemblés avant la mise en bouteille. Dans cette ligne: 7  Fuentes, El Lance, Medianías et Trenzado.

–   les vins dits Parcela, provenant uniquement de parcelles spécifiques situées sur la propriété connue sous le nom de Finca, qui sont vinifiés et mis en bouteille séparément, en nommant les vins comme La Solana, Candio, El Esquilón, El Chibirique, Los Pasitos et Vidonia.

– Et enfin, deux vinifications spéciales appelées Suertes del Marqués Blanco Dulce et Tinto Dulce.

Je vous en propose quelques uns:

D.O. Valle de La Orotava Soagranorte Suertes del Marqués Trenzado blanco 2019

Trenzado est leur Vin de Village, leur vin de base blanc,  il est composé de différents vignobles situés dans la vallée de La Orotava, âgés de 10 à 150 ans, cultivés principalement avec le système traditionnel Cordón Trenzado, qui donne son nom à ce vin. C’est une cuvée composée à 90% de Listan Blanc (appelé également Palomino) et 10% de Vidueño (multitude de cépages originaires des îles Canaries comme Pedro Ximénez, Albillo Criollo, Gual, Marmajuelo o Malvasía) 40% de la fermentation se fait en cuve béton et 60% en futs de chênes français. L’élevage se fait pendant 10 mois sur lies fines, en foudre (500l) de chêne français. Pas de filtration lors de la mise en bouteille. Il est convaincant dès le nez, il révèle des arômes intenses et complexes de fleurs blanches, d’agrumes confits, de fruits secs, des notes fumées et grillées, et d’épices douces. En bouche, c’est un vin minéral, au profil atlantique, avec de la fraîcheur, du corps et de la densité. Une belle finale, avec des notes toastés et salines. Un vin expressif et frais au très bon rapport qualité/prix. PVP:20,50 €

D.O Valle de la Orotava Soagranorte  Suerte del Marques Vidonia 2019

Vidonia, c’est ainsi que les vins de Tenerife élaborés dans le nord de l’île et produits avec des cépages blancs (autres que Malvasía) étaient surnommés au XVIIe siècle. Les vins de Vidonia étaient régulièrement exportés aux Antilles et au Royaume-Uni. Suertes del Marqués Vidonia se veut un hommage à une tradition viticole largement reconnue au Royaume-Uni et aux Antilles à l’époque. C’est un Blanc sec issu de listán blanco majoritairement, mais aussi de  gual, marmajuelo et vijariego blanco, provenant de trois parcelles de la propriété, El Barranco, La Solana et El Ciruelo, situées entre 350 mètres et 520 mètres d’altitude, avec des sols volcaniques, où les cépages blancs sont encore francs de pied avec plus d’un siècle d’âge. Le moût a fermenté en fûts de chêne usagés de 500 litres avec des levures indigènes, où il a mûri pendant 11 mois. Une combinaison de délicatesse et de puissance en équilibre total. Son nez développe des arômes intenses et complexes de fruits jaunes mûrs, des notes d’herbes séchées, de fruits secs et d’épices.En bouche, il est savoureux, juteux fin et ample avec juste une acidité et un fond de boisé, ce qui tend à lui donner une certaine sapidité et tanicité. Un vin avec une bonne structure et une finale légèrement amère. Il a un profil très élégant, équilibré et harmonieux, avec des saveurs concentrées, symétriques et précises, et il est moyennement corsé avec tout vraiment intégré. Impressionnant! Un blanc complexe et délicieux qui exprime son origine avec une grande éloquence, il ne manque ni de  finesse ni d’élégance !30 €

-D.O Valle de la Orotava Soagranorte Suertes del Marqués 7 Fuentes 2018 Tinto Tradicional

Traditionnel parce que le vin représente la région – dans ce cas, la vallée de l’Orotava, outre les 11 hectares en propriété, Suertes del Marqués travaille avec 16 autres vignerons de la vallée d’Orotava. 7 Fuentes est l’un des fruits de tous ces hectares, c’ est le rouge « de base » de la cave,  composé de listán negro (90%) et de tintilla (10%); il est issu de vieilles vignes (plus de 100 ans) pour le Listán et de vignes plus jeunes pour le Tintilla, cultivées en cordons tressés de plusieurs mètres, sur les pentes volcaniques de la vallée, un mélange de nombreuses parcelles que la cave elle-même appelle «villa wine», dans ce qui serait un concept similaire à celui des villages bourguignons. 7 Fuentes est un début de gamme extraordinaire, un cadeau de qualité à 12,50 euros, sachant qu’il est le fruit de 35 parcelles différentes, vinifiées séparément et assemblées avant la mise en bouteille. Un rouge qui reflète l’assemblage  et le travail des différents vignerons de la Zone, élevé 8 mois entre cuves béton et fûts de chêne français, avec un grand potentiel de garde.
Ce vin d’une couleur cerise, nous révèle des notes florales (violettes, roses) et defruits rouges mûrs (cerises, framboises, mures) et des arômes épicés associés à des notes minérales, grillées et fumées, le tout en parfaite harmonie sur un fond subtil de truffe. En bouche, il est savoureux, avec une acidité équilibrée qui lui donne de la fraîcheur c’est un vin frais, avec une certaine densité et concentration. C’est avant tout son caractère minéral qui ressort, même si en bouche il a un côté onctueux et velouté. Une belle finale, avec beaucoup de fruité, de fraicheur et une touche saline. Les tanins sont mûrs et souples. Un vin équilibré, facile à boire: Une pure expression du terroir volcanique de la région. «Je ne gagne pas d’argent avec ce vin mais c’est une bonne introduction», déclare Jonatan.

-D.O Valle de la Orotava Soagranorte Suertes del Marqués La Solana 2018

C’est une cuvée monocépage, composée uniquement de Listan Noir, de vignes très anciennes: une parcelle de 1, 5 hectare exposée Est, située à une altitude comprise entre 400 et 520 mètres au-dessus du niveau de la mer, plantée de Listán Negro dont l’âge varie de quatre-vingts à cent cinquante ans, cultivée selon le système  de cordons tressés. Le sol y est constitué d’une couche argileuse posée sur la roche volcanique, un terroir qui aboutit à un vin dans lequel le fruité et la minéralité se marient subtilement. L’élevage s’est fait pendant 12 mois en fûts de chêne français. C’est un rouge, singulier et étonnant qui révèle après aération, des notes intenses de fruits noirs mûrs, des notes de réglisse, d’épices, des notes fumées, de cendres,  et de garrigue avec beaucoup de fraîcheur, soulignant ainsi son caractère Atlantique inimitable. En bouche, c’est un vin rond et élégant, avec beaucoup de fruité et une belle minéralité « volcanique » ; l’acidité s’impose. Accompagnée de notes d’humus et une pointe iodée, la finale est longue et chaleureuse. Les tanins sont mûrs et bien intégrés. Elle montre une belle fraîcheur qui contrebalance la richesse naturelle de ce jus. Un vin à l’équilibre parfait entre fraicheur, fruit et matière, différent, et stylé : la vieille vigne sur sol volcanique montre son caractère. 17,90€

 –DO Valle de la Orotava Soagranorte Suertes del Marqués El Esquilón 2017

Un rouge issu d’une parcelle d’à peine 1,2 hectare, situé entre 450 et 550 mètres d’altitude et exposée Nord, plantée de Listán Negro d’un âge moyen de quatre-vingts ans et de Tintilla d’une vingtaine d’années. Le vin est soumis à un processus de fermentation alcoolique en cuves de béton ouvertes, à température contrôlée, et à des remontages manuels. Fermentation malolactique et élevage pendant 14 mois en fûts de chêne français. Mise en bouteille sans filtrage. 4000 bouteilles. 20-25 euros. Fraîcheur et finesse au nez, il est complexe et d’une grande profondeur, interprétant un grand récital de fruits noirs, de cacao et d’épices fraîches avec des touches fumées sur un fond minéral. Très expressif en bouche, élégant et ample avec une longue finale mettant en valeur la texture qui est tout simplement incroyable. Essence extraordinaire d’un vin canarien. Même parfois énergique, vivant, savoureux. Très grand.

 –D.O Valle de la Orotava Soagranorte Suetes del Marqués El Ciruelo 2018

C’est un des grands vins volcaniques. Cette cuvée est un assemblage de Listán Negro et d’un petit pourcentage de Listán Blanco. Les raisins proviennent d’une petite parcelle de 0,75 hectares, de vieilles vignes de plus de 90 ans à une altitude de 500 mètres sur un sol de roche volcanique sous une couverture de végétation indigène. Le nom de la parcelle, El Ciruelo, prend son nom des arbres plantés au milieu des vignes, qui sont des pruniers.

 

Le nez est délicat, dévoilant une aromatique très florale, de pivoine, de réglisse, mêlée à de jolies notes de fruits rouges frais et d’épices. En bouche, le vin est très droit, doté d’une belle minéralité. La texture est dense aux tanins souples mais bien présents. La finale est persistante révélant de beaux amers, avec beaucoup de complexité et d’élégance. La longueur est interminable et d’un équilibre rare, un des rouges le la plus surprenant de la région. Produit à quelques quatre milliers bouteilles chaque année. 32.90€

Des vins parcellaires originaux qui triomphent dans le monde, le temps les a positionnés comme l’un des vignobles les plus intéressants des îles Canaries. Si vous, n’avez pas encore goûté aux vins volcaniques, il faut commencer par  les 7 Fuentes rouges pour se familiariser  avec ces touches de phosphore, de soufre, de cendre et d’encens si caractéristiques. Ensuite, vous pourrez continuer avec le reste des vins de la bodega, avec les parcellaires bien qu’ils partagent tous des caractéristiques volcaniques communes, ils sont capables de refléter les différences – parfois très prononcées – entre les parcelles. Comme par magie, ils ont réussi à enfermer un lieu d’origine dans une bouteille.

Bodega Marzagana

Le courrier que j’ai reçu de Claudio Miguel il y a à peine 15 jours a éveillé ma curiosité ! Je n’avais jamais entendu parler de cette bodega, ni de Claudio Miguel même si en ce moment et depuis pas mal de temps déjà, je suis plongée dans les vins de Ténérife. J’ai donc aussitôt appelé Claudio pour qu’il me raconte son histoire. Le contact a été très direct, et très sympathique. Il m’a expliqué qu’il n’est pas issu d’une famille de vignerons,  mais après des emplois de commerciaux stressants, il rêvait d’une vie simple et tranquille, la vigne l’attirait. Avant de s’installer, il avait commencé par récupérer des vignobles du domaine Gómez de La Orotava, c’était en 2012, pendant environ 4 ans, il les avait travaillés tout en observant ce qu’ils demandaient, il partageait la récolte avec le propriétaire. «Je suis autodidacte, je comprends le travail de la vigne car j’ai appris avec les personnes âgées qui ont travaillé la terre toute leur vie, comme on le faisait avant sans pesticides. Puis l’opportunité de louer le domaine où nous sommes maintenant, s’est présentée c’est une petite cave artisanale dans la vallée de La Orotava, à La Perdoma. La zone où se trouvent les vignobles s’appelle Marzagana, c’est un nom guanche (anciens aborigènes de Ténérife), j’ai donné ce nom à ma bodega.

Le vignoble, un peu plus de 3 hectares est à une hauteur de 400 mètres au niveau de la mer. Je fais de l’agriculture biologique. Ici, on dit que dans le nord, on ne peut pas pratiquer l’agriculture bio parce que le vignoble tombe malade. Ce qui se passe, c’est que les gens sont très conditionnés par la peur et ne font pas ce pas. Je suis allé encore plus loin avec l’agriculture biodynamique, mon professeur est Vincent Masson. Tous mes vins sont élaborés sans aucun type d’additif, ce ne sont que des raisins fermentés et transformés en vin. Récolte, soutirage, mise en bouteille selon les rythmes de la lune. Les raisins sont issus du domaine: listan negro, albillo criollo, negra mole, castellana, syrah, tempranillo et grenache. Je ne recherche pas le volume mais la qualité, je recherche la vie dans le sol, je la valorise et je donne ces conditions aux sols pour qu’ils s’expriment dans les vins. Ce n’est pas parce que c’est moi qui les élabore, mais mes vins sont totalement différents des vins dits « canarios », ce sont des vins vivants et comme ils n’ont pas de levures ajoutées, ils n’ont rien à voir avec les vins d’ici. »

N’ayant pas dégusté ses vins, je ne puis vous les décrire, ni vous donner mon opinion. Sa gamme se compose de 6 cuvées (une septièmen un vin orange est en préparation), mais les volumes de chacun sont très faibles.

Quoi qu’il en soit, en l’écoutant, j’ai apprécié le côté humain et simple de ce vigneron et quand il parle de ses pratiques au domaine, de sa vie dans les vignes avec sa famille, ses propos regorgent de sincérité, de passion et de conviction; il ne me reste plus qu’à goûter les vins, j’espère très bientôt. A suivre, donc, je ne manquerai pas de vous en parler.

Hasta pronto,

Marie-Louise Banyols

 

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