En passant par Urville, Drappier, la Grande Sendrée…

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Du côté de la Maison Drappier, ça dépote, les Brut Zéro ont le vent en poupe et représentent à présent plus de 20% de la production du domaine. Leur qualité, leur densité, le plaisir qu’on a à les boire y est pour beaucoup. Mais n’oublions le haut de gamme, créé par Michel Drappier il y a déjà un bon bout de temps, la Grande Sendrée…

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Cuvée de jeunesse, cuvée intelligente…

Urville est un petit village, à peine connu des amateurs très éclairés. C’est un peu le trou du cul de la Champagne, pour le dire avec des fleurs. Alors, pour en faire connaître la production, un seul moyen, jouer la qualité, la vraie, celle qui a du fond, celle qui raconte quelques choses à nos sens. C’est ainsi qu’est née La Grande Cendrée, issue d’un coteau qui garde encore la trace d’un village entièrement dévasté par un incendie, en 1836. Quand on creuse, une couche de cendre indique encore le foyer du drame.

Le grand-père de Michel y planta de la vigne et écrivit dans son carnet « Sendrée » pour le lieu-dit – était-ce un S, était-ce un C, difficile à dire, mais c’est ainsi que le lieu fut enregistré.

Grande Sendrée

Grande Sendrée 2006 Brut Champagne DRAPPIER

Il faut prendre son temps, la laisser s’acclimater. En attendant, elle nous laisse l’admirer. Vert délicat lamellé de platine, quelle élégance! La robe déboutonne avec minutie ses chapelets de nacre. Ils fusent, virevoltent plus vite que notre pensée. Grivoise, non, la Grande Sendrée simplement nous apprivoise pour ensuite nous combler de ses trésors enfouis au plus profonds de ses chairs. En premier, elle nous livre ses parfums, subtils et raffinés certes, mais évoquant la terre où elle est née. Là pousse la camomille, le seigle dont on fait le pain, la gentiane et la réglisse. Elle aime aussi quelque exotisme, sans folie, juste le jus d’une mandarine, une pincée de poivre, un éclat de chocolat blanc. Mais, en creusant un peu, on la sent marquée par un souvenir  caché au plus profond de son âme, indéfinissable senteur très légèrement âcre. C’est ténu mais bien là. Voilà. Une note de silex frotté, de fumée. La bouche ne la remarque pas et s’amuse tout de go des bulles qui aiguillonnent ses papilles. Les affutant à chaque effleurement, les rendant plus réceptives aux arômes floraux et fruités. Les agrumes confits apportent à la fois fraîcheur et amertume. Amertume qui nous envoûte par tant de subtilité, écume plus légère que l’air. Quelques fruits blancs se frottent au relief perceptible de la texture minérale et libèrent leur jus suave. Une douceur bienvenue aboutissement d’une longue retraite souterraine. Confinement méditatif qui débouche aujourd’hui sur une jubilation  d’une allégresse infinie. Tchin !

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La Grande Sendrée assemble 55% de Pinot Noir et 42% de Chardonnay qui poussent dans un sol de craie fine et légère recouvert d’une fine couche de cendre (reliquat de l’incendie de la forêt en 1836).

Seuls les jus de première presse sont utilisés et déplacés par gravité afin d’éviter les pompages et l’oxydation. Utilisation minimale de soufre et débourbage naturel. Fermentation alcoolique d’environ 2 semaines  à basse température suivie de la fermentation malolactique naturelle et complète. Pas de de filtration. Élevage en foudre durant 9 mois. Après la mise en bouteilles pour la prise de mousse, la cuvée reste sur lattes plus de 7 ans

Dosage : 4,5 g/l

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Ciao

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Marco

6 réflexions sur “En passant par Urville, Drappier, la Grande Sendrée…

  1. Un joli conte et bien écrit. Merci Marco!
    Déguster et commenter les effervescents n’est pas un exercice facile, on manque de vocabulaire pour discuter de la texture. L’analogie aux tissus marche bien pour définir la qualité des tanins, soyeux, veloutés, feutrés, rapeux…. Mais quelle analogie pourrait-on pour décrire l’effervescence en bouche? Comment définir cet ensemble tactile qui comprend la taille des bulles, leur vivacité, la tension de la mousse, le gras beurré ou moelleux. Avec la mache, Il y a des mousses qui s’expandent et d’autres qui s’évanouissent, de la nervosité ou de la mollesse… Et puis l’amertume, l’amertume des grands Champagnes!!!, là tu nous offres un bel exemple, à la fois aromatique (agrumes confits) et matière (écume plus légère que l’air), bravo Marco!
    Rappelons que le marché des vins effervescents progresse dans le monde et que le Champagne y reste la référence de qualité mais qu’il est maintenant dépassé par le Prosecco italien et suivi de près par les Cavas espagnols.

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    1. Décrire un vin pour en donner une image au consommateur, qu’il soit amateur ou professionnel, est relativement ardu. Faire des analogies est une piste. Mais comme l’écrit Azelina, il faut à la fois rester dans les clous et faire preuve d’imagination, c’est pas toujours gagné. Merci en tous les cas pour tes compliments, il faudra qu’on se fasse une séance de dégustation de bulles avec différents descriptifs pour arriver à un bon consensus.
      Bises Marco

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  2. Voila une bouteille pour fêter dignement la qualification des Français en finale de l’euro, qui ont enfin vaincu la malédiction allemande! A moins qu’on préfère un vin du Mâconnais pour honorer Griezmann?
    Coïncidence, j’ai dégusté le Brut Zéro rosé de Drappier la semaine dernière. Un vrai champagne de repas, très équilibré. Des raisins plus mûrs qu’ailleurs?

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