Alsace, l’amer, c’est Sommer

Il paraît que l’amer sera la saveur hyper tendance de la décennie prochaine. Voilà qui nous permettra certes d’en parler sans circonvolution, ni bardé d’adjectifs «édulcorants», dans nos commentaires de vins. Finies les « fines amertumes délicates qui renforcent la fraîcheur », ouste les « bitters évanescents qui boostent la sapidité ». On parlera franco, on écrira « un bel amer qui soutient le vin » ou « superbe amertume qui avoue son nom » ou encore, « quel somptueux bitter qui s’insinue entre les méandres fruités de cette cuvée d’exception!« , et basta.

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Notre amie Wiki nous rappelle que :

L’amer, appelé aussi amère ou bitter, est une liqueur apéritive fabriquée à partir de l’infusion de plantes amères. Certains amers entrent dans la composition de différents cocktails. Et nous tape une liste internationale ou figure l’Amer Sommer.

Les Abbot’s Aged Bitters aux États-Unis, l’Angostura au Venezuela, le Campari et le Fernet Branca en Italie ou encore le Cynar à base d’artichaut, le Gran Classico suisse et le Jägermeister allemand, l’Unicum hongrois… et bien d’autres. L’amertume est internationale!

L’Amer alsacien

14_20110704_103719                                                    ouais bon….

Revenons-en à l’amer alsacien, celui de la Maison Sommer. Bien loin de la multitude catalano-hispanique que Marie-Louise nous a joliment mise en vitrine, l’amer en Alsace ne jouit pas ou pas encore de la folie monomaniaque de nos amis ibériques. Mais, le bitter y existe depuis bientôt 150 ans. Né en 1885 près de Strasbourg, il s’est d’emblée destiné à aromatiser la bière. Ce sont Gustave Klein et Ernest Wanner qui ont mis au point la recette, qui privilégie l’agrume et la gentiane.

La macération

Les ingrédients macèrent longuement à l’abri de la lumière dans l’alcool le plus pur.

Durant cette phase, le parfum des écorces de mandarine et d’orange se mêle à la saveur particulière de la racine de gentiane accompagnée d’autres plantes et épices tenues secrètes. Le secret, c’est la recette du succès. Non ? D’ailleurs, chez Sommer, on dit « la composition exacte de l’amer Sommer est un secret bien gardé qui se transmet à chaque génération de «maître infuseur», selon un savoir-faire régional que nous perpétuons dans les caves de notre ancienne brasserie. » Elle se situe à Ingwiller, dans le Bas-Rhin, à l’orée du Parc naturel régional des Vosges du Nord.

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L’Authentique

 C’est le premier créé de la gamme. Sommer fait aussi un amer sans alcool, un autre à l’eau de vie de bière et un sirop de citron.

Il coule comme une liqueur de marron dans le verre, il en a l’aspect et la couleur ambre teintée de rouge sombre. C’est encourageant, ça donne envie. Le nez d’emblée se plaît à respirer les senteurs d’agrumes, l’orange qui semble sanguine domine un temps, remplacé par la mandarine, puis par peut-être de l’armoise et du quinquina. La gentiane reste sous-jacente.

L’odeur amère (oui, je sais, on va me reprocher de sentir un goût, pourtant, il y a des amertumes qui se sentent), donc l’odeur amère semble aussi émaner de la fève de cacao ou de quelque chose de torréfié. D’ailleurs, en bouche, le chocolat apparaît souligné de réglisse et nappé d’un concentré d’artichaut qui fait penser au Cynar en moins amer. Un peu de poivre et de cardamome ajoutent leur pincée épicée au mélange. Quant à la texture du breuvage, il a l’onctuosité d’un sirop, dû probablement à la teneur en sucre assez importante, mais je n’ai aucune info sur ça. Avalé, l’amer sucré persiste un long moment.

Ça, c’est tout seul, mais cet amer est prévu pour être mélangé. À l’origine, à de la bière blonde, mais aujourd’hui, la marque propose différents cocktails et emplois culinaires.

Il est vrai que son onctuosité lui permet de caraméliser par exemple des foies de volaille… Quant aux cocktails, on nous le présente avec du Crémant d’Alsace (qui fête ses 40 ans), avec du pastis, du tonic, différents jus, du vermouth, du rhum façon mojito, …

 

J’ai essayé

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Avec un Crémant, j’en avais un d’ouvert et ça m’a plu. Les bulles acidulées amortissent avec aisance la douceur un rien insistante de l’amer et met en valeur la subtilité de l’amertume. C’est rafraîchissant et malgré la couleur de la mousse un peu bizarre, c’est très plaisant.

www.amersommer.com

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Voilà, jusqu’à la prochaine amertume délicate ou sensuelle ou subtile.

 

Ciao

 

KODAK Digital Still Camera

 

 

Marco

14 réflexions sur “Alsace, l’amer, c’est Sommer

  1. georgestruc

    Merci Marc, rien de tel que la lecture de ton billet pour se tenir éveillé au lieu d’aller dans un lit douillet prendre un repos bien mérité. Mes confrères de la Fac de Strasbourg fonctionnaient tous à « l’amer-bière » mais la fraction amère était apportée par le Picon.

    Tu évoques le Fernet Branca : les bouteilles restent longtemps entamées chez les tenanciers de bistrot…

    Lors de l’excursion géologique d’un symposium, un concours (stupide) de consommation de Fernet Branca a été lancé par un collègue un peu éméché. C’est un prof éminent de Bratislava qui l’a remporté…je ne sais plus combien de verres. Il avait un gosier étamé par des années d’addiction à des boissons fortes…

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  2. On évoquait hier les « modes » en matière de boisson. Si on quitte la géologie, matière solide pour gens ayant les pieds bien … sur terre, pour la sociologie, domaine du soft (un peu pour les « branleurs » en fait), on peut essayer de leur trouver des explications. Dans le monde de la bière aussi, qui est proche du nôtre (c’est le fragile Renaud Séchan qui chantait » Le Picon-bière, même les Belges ne s’y aventurent pas! ») la tendance est à l’amertume et à l’acicité. On y parle de « bitter beer » (très houblonnée) et de « sour beer » (la gueuze p.e.).
    Tout de même, en Alsace, Sommer c’est surtout le … Sommerberg, petit terroir près du « grand » Brand. C’est la ravissante Isabelle Boxler (devenue Madame Sipp entretemps) qui me l’a fait découvrir alors qu’elle avait à peine 17 ou 18 ans. Ahhhhhh, je défaille – rhénane, bien sûr.

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  3. Bonne nouvelle, la mode quitterait la mièvre douceur pour la fine amertume!!
    J’ajoute la Suze pour contribuer à la liste des apéritifs.
    Marc, je te rejoins sur l’odeur de l’amertume, mais je crois quand même que c’est une sorte de raccourci, on sent un élément dont on connaît le goût amer. Comme l’expérience de l’acidité du citron qui peut nous faire saliver rien qu’en le sentant.
    Tu pourrais aussi évoquer la couleur de l’amertume, cette gamme de marron du jaune au brûlé, avec des nuances de vert.
    Reste que la finale amère ne pourra pas être positive parce que « laisser un goût amer » est un signe de regret teinté d’échec…

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    1. C’est peut-être justement cette connotation négative de l’amertume qui décourage le consommateur et qui fait hésiter le commentateur. Il faut sortir de cet infernal travers et assumer l’amer, même s’il rebute encore nombre de dégustateurs peu avertis de ses subtilités.
      La bise Nadine
      Marco

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      1. georgestruc

        Et ce que l’on nomme « le bon amer » dans les vins rouges ? Très intéressant paramètre, qui allonge souvent la longueur en bouche et qui n’a rien à voir avec l’amertume donnée par des rafles pas mûres. On a tous et toutes ressenti cela.

        A propos d’amer, la gentiane, quel délice. Il y a de cela un certain nombre d’années, un barrage destiné à l’eau potable de plusieurs petites communes a été réalisé à Aubrac, dans une cuvette du célèbre plateau. Afin de mettre le basalte à nu, tout la couche herbue a été décapée…et avec elle les gentianes. J’ai du récolter 50 k g de racines que j’ai confiées à la très connue restauratrice Germaine (aligot, tartes, fouaces) pour qu’elle fasse de la liqueur. Six mois plus tard, tout était disponible. Elle avait ajouté un minimum de sucre, en sorte que l’amer de la gentiane ressortait beaucoup plus. Cette liqueur-là me reste en mémoire comme la plus aboutie et la plus fine des gentianes que j’ai jamais dégustée.

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  4. Gilles Théberge

    Bonsoir
    Nous aimerions bien pouvoir goûter ce plaisir de l’amer Sommer. ..cependant il n’est pas disponible au Canada tout comme le Picon, c’est bien dommage
    Il faut contacter M.Alain Smith directeur du marketing à la SAQ société des alcools du Québec à Montréal.
    Puis-je conté sur vous?
    Merci
    Gilles Théberge. Québec

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