Vega Sicilia : l’étoile brillante et ses satellites

Il y a un mois j’ai eu le privilège de participer à une dégustation et présentation de l’ensemble des vins produits par la société Tempos, propriété de la famille Alvarez. Ces noms ne vous diront peut-être rien, mais sachez qu’il s’agit des propriétaires du célèbre Bodega Vega Sicilia dans le région du Ribera del Duero en Espagne. Et pas seulement, car ils possèdent aussi Alion, également à Ribera, ainsi que Pintia à Toro et Macan à Rioja. En dehors de l’Espagne, on trouve aussi dans leur giron Oremus, à Tokaj en Hongrie.

La famille Alvarez a acheté la BodegaVega Sicilia en 1982. Le reste a été acquis ou a été développé ex-nihilo (ou presque) par la suite, petit à petit. Le site web du groupe, qui se trouve incrusté dans celui de son domaine phare, parle de deux axes fondamentaux dans sa stratégie de développement : « la consistance de la qualité du produit comme élément de garantie dans les différents crus, et le dévouement au client comme élément référentiel dans son activité quotidienne. » Sa stratégie de développement a suivi « une règle de croissance basée sur l’implantation de nouvelles caves dans des zones d’élaboration avec un potentiel qualitatif et différentiateur suffisant. Le chiffre de 300 000 l/cave environ a été considéré comme le point d’équilibre idéal entre la qualité et le volume de produit ; bien qu’il existe des cas comme celui de Vega Sicilia, où sont élaborés trois vins différents ; et d’autres comme Alión ou Pintia, où un seul vin par cave est élaboré. De cette manière, l’augmentation de volume produit dans chaque cave individuellement a été évitée. »  

La commercialisation des vins de Vega Sicilia a toujours été particulière, avec la nécessité de s’inscrire sur une liste, puis d’attendre que l’on veuille bien vous assigner un lot de vin. Le site Tempos Vega Sicilia explique la procédure ainsi : « au niveau commercial, les vins sont vendus dans un total de 88 pays et à un nombre approximatif de 4 500 clients du monde entier, tant particuliers que professionnels. La possibilité d’acheter directement au groupe est soumise, en premier lieu, à l’admission comme client, sur demande écrite préalable ; et en deuxième lieu, à l’assignation d’un coupon personnalité variable en fonction des caractéristiques de chaque cru. »

En réalité, les choses sont un peu plus simples pour le client de ses vins, du moins ici en France, car ils sont importés par la société Vins du Monde et sont disponibles, en quantités limitées, à des prix que je mentionne dans mes notes de dégustation. Vous verrez que la plupart se ne sont pas des vins pour tout le monde, ne serait-ce que par leur prix, mais certains sont franchement admirables, réservés certes à une élite d’amateurs ayant les moyens nécessaires.

Nous avons commencé cette dégustation par un vin blanc sec :

Oremus Dry Mandolas 2015, Tokaj

cépage : Furmint 100%

prix : 20 euros

J’ai beaucoup aimé ce vin pour sa manière de combiner finesse de texture et vivacité. C’est aussi suave que salivant en bouche et a une très belle longueur. Les arômes, directes et nets, s’articulent autour de notes de pomme verte et de citron. L’équilibre penche sur le versant de la vivacité. Vin très vibrant.

(note 16/20)

Macan Clasico 2013, Riojà

cépage : tempranillo

prix : 45 euros

Ce domaine est situé dans la partie Alavesa (basque) de la Riojà. Il s’agit  d’une copropriété avec Benjamin de Rothschild, fondée en 2000 et dont le premier millésime fut le 2009.

Nez très parfumé, à tendance florale. Texture élégante et raffinée qui ne masque pas une belle puissance de matière, avec des tannins mi-fermes et une sensation chaleureuse en finale.

(note 15/20)

 

Macan Seleccion 2013, Riojà

cépage : tempranillo

prix : 80 euros

Nez plus sombre, avec des accents terriens sur fond de fruits noirs. Beaucoup d’intensité et bel équilibre. Cette cuvée est à la fois plus « taiseux » et plus tannique que la version « clasico ». Il semble aujourd’hui assez austère mais il a de la réserve.

(note 16/20)

 

Pintia 2012, Toro

cépage : tinta de toro (tempranillo)

prix : 57 euros

Ce vin est tout en muscles et en nerfs. Il est intensément tannique, ce qui rend la finale sèche et l’ensemble peu plaisant. Le fruité est presque totalement dominé et la chaleur de l’alcool est aussi bien présente. Peu agréable donc, et un vin qui ne me semble pas au niveau des autres vins de cette série.

(note 13,5/20)

Alion 2013, Ribera del Duero

cépage : tinto fino (tempranillo)

prix : 80 euros

Le deuxième domaine de ce propriétaire dans la région Ribera del Duero, avec un vignoble de 130 hectares, mais aussi des apports du domaine Vega Sicilia de même propriétaire. La vision exigeante et clairement à long terme du propriétaire est démontré par le fait que les vignes ne rentrent pas dans les vins d’Alion avant d’avoir atteint au moins 10 ans.

Nez expressif et aussi riche que fin. C’est probablement l’acidité qui apporte une partie de cette impression de fraîcheur. Bien mieux équilibré et agréable que le Toro, avec une belle longueur et bien plus de fruit. Ce vin reste très jeune, avec des tannins pas encore fondus, mais il est vibrant et a beaucoup d’élan.

(note 16,5/20)

Valbuena 2012, Ribera del Duero

cépages : tinto fino (tempranillo) 100% (dans d’autres millésime on trouve parfois un peu de merlot, mais il avait coulé en 2012)

prix : 130 euros

Le domaine de Vega Sicilia couvre près de 1,000 hectares et inclut 210 hectares de vignes, ce qui lui permets la production de plusieurs vins, dont celui-ci. L’élavage se fait en barriques neuves à 70%, dont 20% sont nord américains et le reste français. L’élevage dure 15 mois.

Nez profond et complexe, d’une très belle intensité. Les sensations olfactives sont veloutées, et les arômes sont essentiellement de fruite noirs avec un léger accent fumé. En bouche, les sensations sont aussi intense que vibrantes. Ce vin est dynamique, alerte et intensément fruité. Les saveurs sont pointues et il y a une impression de chaleurs, mais les tannins sont bien maitrisés et intégrés.

(note : 17,5/20)

 

Vega Sicilia Unico

(ce vin ne porte pas de millésime, traditionellement)

cépages : tinto fino (tempranillo) et cabernet sauvignon

prix : 250 euros

Le vieillissement prolongé de ce vin, d’abord en barriques, puis en bouteilles a produit une robé un peu plus évoluée que pour les vins précédents. Le nez l’est encore plus. Il est d’une grande complexité avec des couches et des couches qui se dévoilent progressivement à l’aération. C’est bien la texture qui marque le plus sa différence, polie et patinée qu’elle semble en bouche. La vivacité est aussi impressionnante. C’est subtil et sophistiqué, avec une grande longueur. Un très grand vin.

(note 19/20)

 J’ai du partir avant la dégustation du Tokay Oremus 3 puttonyos

en résumé

Une très belle dégustation. Je n’ai pas les moyens d’acheter la plupart des vins ici, mais j’avoue avoir été très séduit, sauf par le Toro dont je ne comprends pas bien l’intérêt dans cette gamme.

David

6 réflexions sur “Vega Sicilia : l’étoile brillante et ses satellites

  1. Ai eu la chance de déguster 3 x Unico. Me souviens plus des millésimes. En effet, même s’il n’est pas millésimé, la bodega publie la liste des millésimes où ce vin est produit, et « on dit » qu’ils le gardent (enfin de mon temps) au moins onze ans avant de le mettre en marché, donc on peut savoir environ de quand il date au moment où il est proposé.
    Ai acheté du Valbuena … dans une vie précédente. Very good indeed. Le tien n’était ni tendu, ni minéral, David, mais « dynamique ». Tu expliques, stp? (Lol).
    Toi qui aime les « success-stories », tu as dû te régaler, David. Est-ce que Macron était là?
    Les prix sont effectivement de la folie mais « moins de la folie » que beaucoup d’autres vins snobs au monde. Et c’est une folie délicieuse.
    Ils n’ont pas de parcelle sur La Clape?

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  2. J’ai eu la chance d’y aller au moins une fois par an pendant plus de 15 ans, justement pour discuter des allocations, et toujours avec la même impatience et bonheur. Le Toro est le plus ingrat, je partage ton opinion David.
    MLB

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    1. Le toro devient rétif à partir du moment où on enfonce la mèche d’un tire-bouchon dans son goulot. Cela lui rappelle les picadors!
      Plus sérieusement, je suis allé la première fois dans cette appellation en … 1988. Il n’y avait qu’un ou deux domaines à faire parler d’eux et à faire de la bouteille, dont Farina, évidemment. Les sols étaient rouges partout et on parlait indifféremment de « tinto del paIs » ou « tinta de Toro » sans savoir que c’est une variété de Tempranillo.

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  3. Unico reserva especial est non millésimé et assemble plusieurs millésimes …
    Je crois que la mise de 2010 implique 2000, 1996 et 1994.

    J’ai bu un très bon 2003 au domaine, qui demande encore de la patience.

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  4. Lors de cette dégustation, on nous a annoncé que le millésime « de base » de l’Unico dégusté était 2005.
    Donc les 10 ans évoqués par Luc tiennent le coup, effectivement.

    Marie-Louise est célèbre à Vega Sicilia. J’ai pu le constater en faisant mes recherches de photos car elle y parait, dans l’une d’elles, avec les propriétaires.

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